Université de Parakou
Faculté de Droit et Science Politique (FDSP)
Forces Armées Béninoises
Ecole Nationale Supérieure des Armées (ENSA)
MEMOIRE POUR L’OBTENTION DU MASTER PROFESSIONNEL ÈS SCIENCE POLITIQUE :
ETUDES STRATEGIQUES, SECURITE, ET POLITIQUE DE DEFENSE
OPTION : POLITIQUE DE DEFENSE
THEME :
LES ENJEUX DE LA COOPERATION ENTRE LES ARMEES
DE L’AIR BENINOISE ET NIGERIANE
Présenté et soutenu par :
Le Capitaine Ibrahim CHABI
Officier des Forces Armées Béninoises
Sous la direction de :
Moktar ADAMOU
Maître de Conférences, Agrégé des Universités/CAMES
Et de
Dr Guillaume ATTOLOU MOUMOUNI
Assistant à l’Université d’Abomey-Calavi
ANNÉE ACADEMIQUE : 2020-2021
Université de Parakou
Faculté de Droit et Science Politique (FDSP)
Forces Armées Béninoises
Ecole Nationale Supérieure des Armées (ENSA)
MEMOIRE POUR L’OBTENTION DU MASTER PROFESSIONNEL ÈS SCIENCE POLITIQUE :
ETUDES STRATEGIQUES, SECURITE, ET POLITIQUE DE DEFENSE
OPTION : POLITIQUE DE DEFENSE
THEME :
LES ENJEUX DE LA COOPERATION ENTRE LES ARMEES
DE L’AIR BENINOISE ET NIGERIANE
Présenté et soutenu par :
Le Capitaine Ibrahim CHABI
Officier des Forces Armées Béninoises
Sous la direction de :
Moktar ADAMOU
Maître de Conférences, Agrégé des Universités/CAMES
Et de
Dr Guillaume ATTOLOU MOUMOUNI
Assistant à l’Université d’Abomey-Calavi
ANNÉE ACADEMIQUE : 2020-2021
AVERTISSEMENT
Les opinions exprimées dans ce mémoire sont purement personnelles à leur
auteur. Elles ne reflètent en aucun cas la position du haut commandement des Forces
Armées Béninoises, de l’Ecole Nationale Supérieure des Armées ou de l’Université de
Parakou.
i
DEDICACE
Aux regrettés KOUSSOUNON CHABI Imorou et BONI ZIME Mariam,
A mon épouse Nadiath ZIME MAKO et ma fille Arifath Gnon Goura CHABI
A mes frères Assane, Hamidou, Moukaïla, Azizou, Abdoul-Ramane, Roufaï, Sahadou,
Léroine Tori et ma sœur Rabiatou CHABI IMOROU.
ii
REMERCIEMENTS
Mes sincères remerciements vont à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué
à la rédaction de ce mémoire, en particulier :
A l’endroit de l’administration de l’Ecole Nationale Supérieure des Armées et ses
Cadres Professeurs de Groupe, pour la rigueur imprimée à la formation et la
qualité de leurs enseignements ;
Aux enseignants chercheurs-chercheurs de la Faculté des Sciences Politiques de
l’Université de Parakou ;
Au Professeur Moktar ADAMOU, ainsi qu’au Docteur Guillaume ATTOLOU
MOUMOUNI, pour leur disponibilité tout au long du processus d’encadrement et
surtout leurs conseils sur l’aspect rédactionnel de ce mémoire ;
Au Docteur Azizou CHABI IMOROU, pour m’avoir toujours guidé ;
Au Colonel SHOBO Babatounde, Attaché de Défense de la République Fédérale
du Nigéria près le Bénin, pour sa disponibilité ;
Aux Généraux de Brigade Etienne ADOSSOU et Adam TAFFA pour leur
coaching ;
Aux Colonels (ER) Abdoulaye GOGUE, Léonard BATOSSI et Charles
GBAGUIDI pour leurs apports ;
Au Colonel Hermann William AVOCANH pour son soutien ;
Aux Lieutenant-Colonels Claude Raoul DJEHOUNGO, Valère ADAMASSOU,
Hervé Sètondji ALLOTCHENOU et au Chef de Bataillon Saka Yerima YAROU
DAFIA pour leurs orientations ;
A mes chefs, les Commandants Amoussa Luc BIOBOU, Fiton Claude
AHOUNOU, Thierry MONDA et Kocouvi Fernand SOHOU pour leurs conseils
précieux ;
Au Capitaine Idrissou BAKO pour son assistance ;
Et à l’Adjudant-Chef Gaëtan POHOUEGBE pour le soutien dont il a fait montre
tout au long du processus de recherche.
iii
DEFINITION DES SIGLES ET ABREVIATIONS
AAB
:
Armée de l’Air du Bénin
AIPMC
:
Aeronautical
Company
ALO
:
Aviation Légère d'Observation
AMT
:
Assistance Militaire Technique
ANAC
:
Agence Nationale de l’Aviation Civile
APSA
:
Architecture Africaine de Paix et de Sécurité
ASECNA
:
Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en
Afrique et à Madagascar
AT
:
Armée de Terre
AOAV
:
Action on Armed Violence
BACA
:
Base Aérienne de Cana
BACO
:
Base Aérienne de Cotonou
BALPA
:
Base Logistique de Parakou
BAM
:
Bataillon d'Artillerie Mixte
CARIC
:
Capacités Africaines de Réaction Immédiate aux Crises
CAS
:
Close Air Support
CDB
:
Commandant de Bord
CEAO
:
Communauté Economique de l’Afrique de l’Ouest
CEBELAE
:
Centre Béninois des Langues Etrangères
CEDEAO
:
Communauté Economique des Etats de l’Afrique de
l’Ouest
CEMAA
:
Chef d’Etat-Major de l’Armée de l’Air
CER
:
Communauté Economique Régionale
CERFA
:
Comité d’Etude des Relations Franco-Allemandes
Industrial
and
Project
Management
iv
CFOMP
:
Centre de Formation aux Opérations de Maintien de Paix
CIFCA
:
Centre d'Instruction des Fusiliers Commando de l'Air
CMAAOM
:
Centre Multinational d’Appui Aérien aux Opérations
Maritimes
CMCM
:
Centre Multinational de Coordination Maritime
COFA
:
Commandant des Forces Aériennes
DAO
:
Département de l’Appui Opérationnel
DCMOP
:
Direction de la Coopération Militaire et des Opérations de
Paix
DCU
:
Déclaration de Caractéristiques de l’Unité
DEM
:
Diplôme d'Etat-Major
DOT
:
Défense Opérationnelle du Territoire
EAA
:
Ecole de l’Armée de l’Air
EAALAT
:
Ecole d’Application de l’Aviation Légère de l’Armée de
Terre
EAT
:
Escadron d'Avions de Transport
EDG
:
Ecole de Guerre
EEI
:
Engin Explosif Improvisé
EH
:
Escadron d'Hélicoptères
EMAA
:
Etat-Major de l’Armée de l’Air
EMG
:
Etat-Major Général
ENSA
:
Ecole Nationale Supérieure des Armées
ENVR
:
Ecoles Nationales à Vocation Régionale
ETM
:
Escadron de Transport Mixte
EVASAN
:
Evacuation Sanitaire
FAA
:
Force Africaine en Attente
FAB
:
Forces Armées Béninoises
FDS
:
Forces de Défense et de Sécurité
v
FFS
:
Full Flight Simulator
GAT
:
Groupes Armés Terroristes
GN
:
Garde Nationale
IAC
:
International Aviation College
IPOB
:
Indigenous People of Biafra
ISR
:
Intelligence Surveillance and Reconnaissance
ISTAR
:
Intelligence, Surveillance
Reconnaissance
MAEC
:
Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération
MDN
:
Ministère de la Défense Nationale
MEDN
:
Mouvement pour l’Emancipation du Delta du Niger
MN
:
Marine Nationale
NAF
:
Nigerian Air Force
ONU
:
Organisation des Nations Unies
PED
:
Pays en Développement
RTC
:
Centre d’Entrainement des Bataillons
SDN
:
Société des Nations
SNU
:
Système des Nations Unies
SOBEH
:
Société Béninoise des Hydrocarbures
SSS
:
Société Sucrière de Savè
SWOT
:
Strenghts Weaknesses Opportunities Threats
TAB
:
Transports Aériens du Bénin
UAV
:
Unmanned Aerial Vehicle
UGV
:
Unmanned Ground Vehicle
UP
:
UP : Université de Parakou
Target
Acquisition
and
vi
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Places de formation offertes par la NAF à l’AAB ( de 1979 à 2012) . ......... 29
Tableau 2: Types de drones militaires utilisés par les Forces Armées nigérianes ........... 32
Tableau 3: Matrice SWOT de l’AAB dans sa coopération avec le Nigéria. ..................... 40
Tableau 4: Calendrier de naissance des États francophones voisins du Bénin................ 46
Tableau 5: Matrice SWOT de la NAF dans sa coopération avec l’AAB. ......................... 50
vii
LISTE DES PHOTOS
Image 1 : Un avion HS-748 du Bénin .............................................................................. 19
Image 2: Pilote d'hélicoptère A-109 du Bénin en formation en Belgique. ....................... 21
Image 3: Une prise d'armes à la BACO ........................................................................... 24
Image 4: L’Aérospatiale Corvette immatriculé plus tard TY-BBK ................................... 27
Image 5: Un des deux avions Dornier Do-28 offerts par le Nigéria ................................ 28
Image 6: Carte des aérodromes du Bénin. ....................................................................... 38
Image 6: Quelques avions ABT-18 nigérians ................................................................... 76
Image 7: Présentation officielle du drone militaire nigérian « Gulma » en 2013. ........... 78
viii
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE __________________________________________ 1
PARTIE I:
CHAPITRE 1:
ETAT DES LIEUX _______________________________________ 15
HISTORIQUE ET ETAT DES LIEUX DE LA COOPÉRATION
ENTRE L’AAB ET LA NAF ____________________________________________ 16
Section 1: Brève historique de l’Armée de l’Air du Bénin __________________ 16
Section 2: Etat des lieux de la coopération militaire entre l’AAB et la NAF ____ 24
CHAPITRE 2:
ANALYSE DES FORCES ET FAIBLESSES, OPPORTUNITÉS
ET MENACES (SWOT) DE L’AAB ET DE LA NAF ________________________ 34
Section 1: Les atouts et faiblesses de l’AAB _____________________________ 34
Section 2: Les opportunités nigérianes, les contraintes et les facteurs de risque _ 41
Conclusion partielle de la première partie ________________________________ 50
PARTIE II:
LA MULTIPLICITE DES ENJEUX ET LES PERSPECTIVES D’UNE
MEILLEURE COOPERATION POUR LE BENIN __________________________ 52
CHAPITRE 3:
LES ENJEUX MULTIPOLAIRES _______________________ 53
Section 1: De la nécessité d’appuyer les autres forces de défense ____________ 53
Section 2: Les enjeux de la participation aux opérations militaires régionales ___ 59
CHAPITRE 4:
LES PERSPECTIVES DE COOPÉRATION EFFICACE _____ 66
Section 1: Le pôle formation et les possibilités de création des centres opérationnels
de formation du personnel ____________________________________________ 66
Section 2: Le pôle maintenance des appareils et transfert de technologies ______ 71
Conclusion partielle de la deuxième partie________________________________ 79
CONCLUSION GENERALE ___________________________________________ 81
ix
RESUME
Au Bénin, l’Armée de l’Air, malgré ses diverses mutations, peine encore à relever
son niveau opérationnel. Si pendant la guerre froide elle a disposé difficilement d’un strict
minimum d’aéronefs militaires en bon état, la période actuelle est plutôt marquée par une
baisse drastique d’activités aériennes qui entrave son opérabilité. L’insuffisance de
ressources dédiées à la formation, à l’entretien du matériel et à l’opérationnalisation du
personnel, ont progressivement condamné les aviateurs à l’utilisation de matériels
vétustes puis accentué leur dépendance technique vis à vis des partenaires étrangers.
Aujourd’hui, ce pays francophone, encore attaché à l’Assistance Militaire Technique
française, manque de stratégies pour capitaliser les multiples atouts aéronautiques et
technologiques de son vaste et dynamique voisin avec qui il partage les mêmes menaces.
Les avantages à tirer d’une meilleure coopération bilatérale entre l’Armée de l’Air
du Bénin (AAB) et la Nigerian Air Force (NAF) sont multiples et multidimensionnels.
D’une part, en mettant en place des pôles aéronautiques, l’AAB et la NAF pourront
ensemble soutenir les efforts quotidiens de leur Marine Nationale et de leur Armée de
Terre engagées respectivement dans la lutte contre la piraterie maritime et le terrorisme
transfrontalier, et d’autre part, assurer la maintenance du matériel volant ainsi que la
formation du personnel en accord avec les ambitions communes. Pour y arriver, l’AAB
doit élaborer et soumettre au gouvernement, une stratégie appropriée aux fins de mobilier
les ressources suffisantes pour redynamiser cette coopération. Aussi, ce pays devra-t-il
ajuster son budget de défense, afin de faciliter la mise en œuvre d’une communauté
pluraliste de sécurité. Ainsi, l’AAB pourra désormais non seulement profiter de la rente
onusienne en y engageant ses moyens volants, mais aussi jeter les bases du
développement d’une industrie de défense.
Mots-Clés : Afrique de l’Ouest, Armée de l’Air du Bénin, Nigerian Air Force
(NAF), Coopération Militaire, Défense.
x
ABSTRACT
Despite the various changes experienced, the Benin Air Force (AAB) is still
struggling to raise its operational level. If during the Cold War, this service was hardly
equipped with a few number of serviceable military aircrafts, the current era has
witnessed the unfortunate reduction of air assets that lead consequently to a drastic drop
of air activities, hindering its operability. Insufficient resources dedicated to training,
equipment maintenance and personnel’s operationalization, have gradually condemned
its airmen to the use of obsolete equipment and then worsen their technical dependency
on foreign partners. Currently, Benin remains attached to the French Military Technical
Assistance and lacks strategies to capitalize the wide range of aeronautical and
technological advantages, that are available in the dynamic neighborhood country that
shares the same threats.
Multiple and multidimensional benefits can be drawn from a better bilateral
cooperation between the AAB and the NAF. On the one hand, by setting up aeronautical
poles, the AAB and the NAF will be able to support the daily efforts of their National
Navy and Army engaged respectively in the fight against maritime piracy and crossborder terrorism, and on the other hand, ensure the maintenance of air assets as well as
the training of the personnel in accordance with the common ambitions. To achieve this,
the Benin air force authorities, should submit to their government an appropriate strategy
to collect sufficient funds so as to revitalize this cooperation. This country will therefore
have to adjust its defense budget in order to facilitate the implementation of a holistic
security community with Nigeria. Consequently, the AAB will not only be able to benefit
from the UN incomes by engaging its air assets to it, but also by establishing the
prerequisites for the development of a national defense industry.
Key words : Benin Air Force, Defense, Military Cooperation, Nigerian Air Force
(NAF), West Africa.
xi
INTRODUCTION GENERALE
Comme le souligne Lebœuf, « Les questions de sécurité exigent une approche
intégrée, qui prenne en compte à la fois les aspects régionaux, les dynamiques
technologiques et militaires mais aussi médiatiques et humaines, ou encore la dimension
nouvelle acquise par le terrorisme ou la stabilisation post-conflit »1. C’est dire que ces
questions nécessitent l’interopérabilité entre armées voisines en imposant aux africains,
l’évolution progressive vers une coopération régionale pour un arrimage des actions
engagées aux défis sécuritaires du moment. Ainsi, face au fléau du « terro-banditisme »2
grandissant, les Etats africains ne devront point envisager de pouvoir juguler tout seul, les
dangers inhérents à cette nébuleuse.
Aussi, les capacités industrielles actuelles des pays africains peuvent-elles
difficilement aboutir à la conception unilatérale de matériels performants capables de
combler leurs attentes sur le plan sécuritaire. C’est pourquoi, perçue comme une source
d’excellence et d’innovations technologiques, l’industrie de défense peut être élaborée à
travers le besoin sans cesse croissant des armées de l’air en matériels performants et
simples d’emploi en opération. Ce sont ces besoins qui conduisent les techniciens et
industriels aéronautiques à innover dans leur recherche de solutions pour exploiter les
ruptures technologiques. Lesquelles permettent de guider l’application de la puissance
aérienne pour protéger, prévenir et prendre l’avantage sur l’ennemi puis contribuer aux
objectifs stratégiques communs à court et long termes. Cela exige des industriels et
techniciens aéronautiques, un partage de doctrine et des procédures puis une
communication permanente. En réalité aujourd’hui, plus que par le passé, l’intégration de
la technologie aérienne (dont la coopération internationale est un inhibiteur) aux moyens
traditionnels des forces de surface s’avère indispensable.
1
A. LEBOEUF, « Coopérer avec les armées africaines », Revue Ifri focus stratégique n°76, octobre 2017,
p.5.
2
Terme utilisé pour désigner les activités menées par AQMI, le MUJAO et Ansar Eddine ; (cf. L.
TOUCHARD, « Niger : les enjeux de la coopération sécuritaire avec la France », Jeune Afrique du 03 mars
2014. URL http:www.jeuneafrique.com, consulté le 27 septembre 2021 à 23 :45
1
Dans les contextes actuels marqués par l’internationalisation des menaces
terroristes, la coopération militaire régionale est de plus en plus considérée comme un
passage obligé pour les Etats. Tel que le concept de « complex interdependance »,
développé par Joseph Nye et Robert Keohane, à l'ère de la mondialisation, elle constitue
une nécessité incontournable et les accords de coopération en constituent un fondement
tangible. Elle se traduit par des relations militaires entre les composantes d’armées
voisines, par des actions de formation ainsi que des manœuvres multinationales.
En ce qui concerne particulièrement le Bénin et son grand voisin le Nigéria, « ces
dernières années ont été marquées par des échanges réguliers dans le domaine du
renseignement, de la surveillance des frontières, de la lutte contre la piraterie maritime,
et des actions de formation ou de recyclage »3. Ce faisant, il importe d’apprécier les
atouts et faiblesses de ce partenariat stratégique vieux des années 1980, afin de trouver
les moyens de le rendre plus optimal au profit de la communauté ouest-africaine. C’est
dans cette perspective que s’inscrit la présente réflexion intitulée : « Les enjeux de la
coopération entre les Armées de l’Air Béninoise et Nigériane ».
Afin de bien cerner cette thématique, il convient de clarifier trois concepts clés :
l’enjeu, la coopération (militaire) et l’Armée de l’Air.
En se référant au Robert historique de la langue française de 2019, le terme enjeu
est étymologiquement issu du mot jeu, et provient de l’idée de mettre en jeu. « Il y a donc
l’idée sous-jacente d’une relation (qui et avec qui ?) qui est déterminante puisqu’elle
implique un gain ou une perte (qu’est-ce qui est en jeu ?) pour l’un ou l’autre »4. D’après
l’office québécois de la langue française5, ce terme signifie : « ce que l’on peut gagner ou
perdre, par exemple, dans un projet, une lutte, une élection ou une activité ».
3
Entretien avec un officier supérieur des FAB à la retraite, à Abomey-Calavi, le 13 mai 2021.
G. Brisson, Exploration conceptuelle de la notion d’enjeu et de quelques termes apparentés, Rimouski,
Québec, 2016, p. 6.
4
5
URL http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.as px?Id_Fiche=8362968, consulté le 20 mai 2021.
2
Quant au terme coopération, il revêt une double connotation. Au sens premier, il
désigne l’action de coopérer qui signifie d'après le dictionnaire Larousse de la langue
française édition 2017, « agir conjointement avec quelqu'un ». Au sens second, la
coopération désigne « la politique d'échanges et d'actions conjointes dans les domaines
économique, technique, financier, culturel, sportif ou de tout autre ordre, entre pays »6.
Elle sous-entend un intérêt visible ou caché de chacune des parties. L'adjectif militaire
fait référence à toute chose ayant trait à l'armée et à la défense. Un accord de coopération
militaire est donc « un arrangement », une « entente mutuellement bénéfique » entre
plusieurs pays proches par leurs idées ou leurs sentiments et désireux de collaborer dans
le domaine militaire.
En ce qui concerne l’Armée de l’Air, c’est la composante des Forces Armées d’un
Etat, chargée de la mise en œuvre de la puissance aérienne pour la défense des Etats.
Historiquement, la première armée de l’air a été créée en 1918 en Angleterre7. L’Armée
de l’Air du Bénin (AAB)8 est l’une des composantes des Forces Armées Béninoises
(FAB), créée le 1er Septembre 1961.
L’Armée de l’Air du Nigéria, la Nigerian Air Force (NAF) a quant à elle été créée
en 1964, par une loi de l’Assemblée Nationale du pays9, quelques années après son
accession à l’indépendance. Des principaux rôles qui lui sont dévolus, figurent la défense
de l’espace aérien et la participation au bien-être de la population10.
6
H.N. NJOYA, La coopération militaire camerounaise : enjeux et fonctionnement, Université de Yaoundé
II, Master en Stratégie, Défense, Sécurité, Gestion des Conflits et des Catastrophes, 2010.
7
H. COUTAU-BEGARIE, « La pensée stratégique aérienne » in Traité de stratégie, Institut de stratégie
comparée EPHE IV, Edition Economica, 2002, p. 636-637. L’armée de l’air est rendue autonome en Italie
en 1923, en France en 1933 puis aux Etats-Unis en 1947.
8
Appellation générique de la composante aérienne des FAB, suite à la réforme constitutionnelle du 07
novembre 2019 ayant entraîné en Juillet 2020, la modification de la loi portant création des FAB et un
changement de dénomination des Forces Aériennes en « Armée de l’Air ».
9
The Air Force Act of 1964.
10
Directorate of Public Relation, Documentary on Capacity Building in the Nigerian Air Force.
M.youtube.com/watch ?v=PdHPm4ldMts consulté le 29/03/2021 à 21 :45.
3
Les enjeux de la coopération entre les Armées de l’Air nigériane et béninoise
peuvent donc être considérés comme les défis de la politique d'échanges et d'actions
conjointes dans le domaine de la défense aérienne de ces deux Etats et de leur
participation à la Défense Opérationnelle du Territoire (DOT).
C’est pourquoi, le cadre géographique de référence de cette étude est l’espace
délimité par la République du Bénin et celle Fédérale du Nigéria. Ces deux pays de
l’Afrique de l’Ouest « partagent longitudinalement plus de 800 kilomètres de frontières
où se sont établies historiquement différentes populations dont l’ethnologie est très
voisine »11. Les deux pays étant membres de la Communauté Economique Des Etats de
l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), cet espace physique s’étend à cette organisation
politique communautaire, créée le 28 mai 1975 à Lagos regroupant une population
estimée en 2016 à 356 300 000 habitants et une superficie d’environ 5 114 240 km2
12
.
La CEDEAO est composée de quinze (15) pays dont huit (08) francophones (Bénin,
Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal et Togo), cinq (05)
anglophones (Gambie, Ghana, Libéria, Nigéria, et Sierra Léone) et deux (02) lusophones
(Cap-Vert, et Guinée Bissau).
D’un point de vue historique l’année 1979 marque le début de la coopération entre
les deux Armées de l’Air. C’est en effet, au cours de cette période que les deux pays aux
traditions coloniales différentes vont entreprendre une coopération bilatérale dynamique
et directe. L’année 2020 correspond à l’année d’une réforme majeure au sein de l’armée
béninoise avec la transformation des forces aériennes en Armée de l’Air. C’est pourquoi
les bornes chronologiques de l’étude se situent entre 1979 et 2020.
En réalité, aux lendemains des indépendances des pays africains, la quasi-totalité
des anciennes colonies françaises s’est engagée avec les anciens colonisateurs dans les
accords de coopération dont les termes sont parfois tenus secrets. Si les clauses de ces
contrats ont longtemps entravé toute autre coopération militaire avec les pays concernés,
11
A. L. SOSSOU-AGBO, Dynamique territoriale à la frontière bénino-nigériane: rôle des marchés du SudEst, Brit XI, Geneve/Grenoble, France, 2011, p.23.
12
URL www.ecowas.int consulté le 06 Août 2021 à 8 :32 :15.
4
progressivement, certains pays développés ou émergents entretiennent aujourd’hui des
coopérations militaires avec plusieurs pays africains. Ainsi, les Etats-Unis, la France, la
Chine, l’Angleterre, le Canada, la Belgique, la Russie, le Japon, Israël, l’Allemagne,
l’Inde, le Pakistan, l’Indonésie, le Brésil, etc, sont aujourd’hui des partenaires privilégiés
de plusieurs armées africaines. Au-delà des intérêts de sécurité nationale recherchés, les
leaders africains utilisent tant bien que mal, leurs forces armées pour promouvoir la
sécurité collective à travers les Communautés Economiques Régionales (CER). Mise en
place sous l’égide de l’Union Africaine (UA) à travers son système de sécurité collective
appelé Architecture Africaine de Paix et de Sécurité (APSA), la Force Africaine en
Attente en constitue la plus importante des composantes militaires. En revanche, très
rarement la coopération militaire intra-africaine entre deux pays aura suffisamment été
dynamique pour dépasser officiellement l’échange de stagiaires dans les écoles militaires
nationales de formation. Il convient toutefois de souligner des cas inédits comme celui de
l’entreprise sud-africaine Chute Systems qui gère depuis 2009 l’école de parachutisme
namibienne13.
L’histoire nous enseigne qu’en 1969, soixante-six ans après le vol inaugural des
frères Wright14, l’aéronautique avait tellement pris une nouvelle dimension dans les pays
développés que le premier drapeau national fut planté sur la lune par l’astronaute
américain Nieil Amstrong. Suite à cet évènement mondial inédit, l’on assista à une
montée en puissance des armées de l’air de plusieurs pays en voie de développement.
Très tôt, l’Armée de l’Air qui à travers l’aviation, modifie les données de la puissance et
le rapport de l’homme au territoire, se verra attribuer un rôle sans cesse croissant15 dans
les conflits africains. Le Nigéria, prenant la mesure de cette capacité de l’arme aérienne
s’est engagé dans les années 1980 à la développer tout en initiant une coopération entre
son armée de l’air et celle du Bénin. Cette coopération, alors dynamique et directe s’est
13
L. Touchard, « Namibie », in, Forces armées africaines, createSpace edition, 2017, p.174.
Les frères Orville et Wilbur Wright sont les pionniers de l’aviation ayant effectué le 17 décembre 1903,
le premier vol motorisé.
14
M. DAUMAS, Sur les premières étapes de l’aérostation : Histoire générale des techniques. L’expansion
du machinisme, Paris, P.U.F.,1968. p.413-419.
15
5
surtout axée sur la formation du personnel navigant et technique. A contrario, lorsqu’on
évalue les nombreuses actions entreprises dans certains pays voisins dont le Bénin, les
stratégies visent plutôt la montée en puissance de l’Armée de Terre (AT) et de la Marine
Nationale (MN). Ces deux composantes de surface sont alors condamnées à coordonner
les actions menées dans la troisième (3ème) dimension avec les armées étrangères. Mais
ce modus operandi, utilisé dans des actions de défense contre le groupe Boko Haram16, a
fini par montrer ses limites pour des raisons inhérentes à la nature même des armées
africaines, et leur faible degré de professionnalisation. Dès lors, plusieurs pays africains
ont opté pour la montée en puissance de leurs propres Armées de l’Air avec l’acquisition
de plusieurs aéronefs de renseignement et d’attaque. Cette option stratégique qui requiert
une coopération régionale pour une rapide autonomisation et professionnalisation,
constitue le sous bassement de la mise en œuvre de solutions afro-africaines susceptibles
de changements progressifs adaptés et soutenus comme cela fut le cas dans les pays de
l’Organisation du Traité de l’Atlantique du Nord (OTAN).
L’intérêt de notre étude est double : scientifique et pratique. D’une part, l’AAB a
été créée en 1961 et s’est développée sous influence soviétique au nom d’une idéologie
communiste17. C’est l’une des institutions militaires des FAB qui regorge le plus de
personnels dotés de hautes capacités technologique et scientifique. Cependant, il y a eu
un vide criard d’innovations technologiques qui s’explique par l’absence d’un cadre
formel de recherche y dédié et la non activité des professionnels de l’aviation pouvant
même créer vis-à-vis de l’Etat un contentieux pour droit de créance18. Ainsi, l’intérêt
scientifique de l’étude réside dans le souci de contribuer modestement à
l’approfondissement des connaissances existantes dans le domaine et au renforcement des
capacités opérationnelles des personnels. Elle se propose également de participer à
l’élaboration de documents doctrinaux de coopération au profit de cette composante
16
Une faction du groupe se fait désormais appeler « Province ouest-africaine de l’Organisation de l’État
islamique (ISWAP)» à la suite de son allégeance au mouvement djihadiste État islamique (EI) début 2015.
Augé Axel, Klaousen Patrick (dir.), Réformer les armées africaines. En quête d’une nouvelle stratégie,
Paris, Karthala, 2010, p.228.
17
18
Le droit personnel ou droit de contraindre l’employeur (Etat) à exécuter l’obligation d’emploi.
6
militaire. Enfin elle pourrait servir de tremplin aux projets technologiques ultérieurs et de
boussole à la mise en œuvre de projets technologico-industriels bilatéraux.
D’autre part, étant un professionnel de l’aéronautique, spécialiste de la voilure
tournante19 au sein de l’AAB, nous avons vécu des difficultés liées à la disponibilité et la
maintenance des matériels volants. Les offres de formations et les appuis techniques
prospectés, ont longtemps visé une coopération européenne au détriment des pays
africains voisins dotés de potentialités techniques et partageant avec nous les mêmes
menaces. C’est pourquoi, l’intérêt pratique de cette réflexion est de contribuer à mettre à
la disposition des décideurs, des approches perfectibles pour la mise en formation du
personnel, leur meilleure employabilité et la création de conditions favorables à
l’émergence d’une industrie nationale de défense. Elle indiquera peut-être ainsi la marche
à suivre aux autres Etats membres de la CEDEAO pour une coopération régionale de
défense qui se veut à terme panafricaine.
L’objectif général de l’étude est d’analyser les atouts d’une politique de
coopération bilatérale entre l’AAB et la NAF et de dégager des pistes pour une
optimisation de cette coopération dans la lutte contre les nouvelles menaces qui
alimentent les débats du monde de l’après-guerre froide20. Notre analyse qui n'a pas la
prétention de répondre à toutes les questions afférentes à la problématique, dégagera
également des éléments essentiels à la clarification du double contexte socio-économique
et sécuritaire sous-régional.
De cet objectif général, découlent deux objectifs spécifiques :
Objectif spécifique n°1 : Faire un diagnostic stratégique des atouts et faiblesses
des Armées de l’Air du Nigéria et du Bénin ;
19
Terme utilisé pour désigner l’aéronef dont l’élément sustentateur est tournant tel qu’un hélicoptère.
20
Francis Fukuyama, The End of History and the Last man, New York, Free Press, Maxwell Macmillan
International, 1992, p.202.
7
Objectif spécifique n°2 : Faire des propositions concrètes visant à l’optimisation
de cette coopération dans le cadre de la lutte contre les nouveaux fléaux21.
La question centrale dans le cadre de cette étude est la suivante : Quelle est la
portée d’un renforcement de la coopération militaire entre les armées de l’air béninoise
et nigériane ? Les deux questions subsidiaires qui en découlent sont :
Question auxiliaire n°1 : Quels sont les atouts et faiblesses actuels de cette
coopération dans le contexte de lutte contre les nouvelles menaces ?
Question auxiliaire n°2 : Quelles sont les options stratégiques pour une meilleure
coopération bilatérale entre les composantes aériennes béninoise et nigériane dans le
contexte actuel ?
En dépit de la pauvreté de la littérature sur la coopération militaire entre les armées
africaines, il existe une floraison d’ouvrages et d’articles sur la coopération en général,
les coopérations de défense entre les pays européens, américains, entre les puissances
occidentales et les pays africains, sur les difficultés de coopération militaire entre pays
africains, sur la coopération transfrontalière Bénin-Nigéria, et sur le renforcement des
capacités des armées africaines.
De façon générale, les écrits disponibles renseignent sur trois grandes approches
de la coopération en matière de défense :
-
L’approche globale ou internationale
La première approche qualifiée de globale ou internationale privilégie une
coopération universelle au sein et autour du système onusien. Dominés par les Etats-Unis,
les pays en fonction de leur puissance respective y assument des positions relatives.
Kenneth Waltz plaide pour une hégémonie “bienveillante” des Etats-Unis dans le
monde. Pour lui, « l’étude de la politique internationale en tant que système exige qu’on
21
Notamment le terrorisme, la piraterie maritime, la cybercriminalité et la criminalité transfrontalières.
8
se concentre sur les Etats qui comptent »22 Par contre, pour Delphine Deschaux-Dutard,
« la paix ne se décrète pas par des traités. Elle dépend largement de l’instauration d’une
communauté internationale capable d’agir comme un acteur collectif »23. C’est ce que
confirment Guillaume Devin et Marie-Claude Smouts qui estiment que « la sécurité
internationale est devenue progressivement un enjeu collectif qui est garanti non
seulement par les Etats mais aussi par les organisations internationales »24. Questionnant
la nature des relations au sein des sociétés Thomas Hobbes, quant à lui, place l’Etat et la
guerre au cœur de tous les phénomènes. Pour ce théoricien du réalisme classique des
relations internationales, « les relations entre les Etats, à l’instar des rapports entre les
hommes, sont marquées par la « guerre de tous contre tous »25. C’est dans cette tradition
que s’inscrit Hans Morgenthau dans ‘’Politics among Nations. The struggle for Power
and Peace’’ pour qui, l’intérêt national dans les relations internationales se définit en
termes de puissance26. Les Etats de ce fait, poursuivent tous un même but, la recherche
de la puissance. Pour cet auteur, tout comme pour certains précurseurs comme Raymond
Aron, ou encore Jean Jacques Rousseau, la caractéristique essentielle de la vie
internationale réside dans cette absence d’autorité mondiale par opposition à la situation
interne au sein des Etats. En revanche, pour les constructivistes comme Nicolas Onuf et
Alexander Wendt, plus que les rapports de puissance, ce sont les identités et les
perceptions qui guident le comportement des Etats dans les relations internationales.
-
L’approche multilatérale
La deuxième approche dite multilatérale, opte pour une sécurité collective au sein
des communautés pluralistes de sécurité. « La pratique consistant à négocier à plus de
22
K. N. Waltz, Theory of International Politics, New York, Random House, 1979, p.5.
23
D. DESCHAUX-DUTARD, Introduction à la sécurité internationale, Presses Universitaire de Grenoble,
2018, p.109.
24
G. DEVIN et M.C SNOUTS, Les organisations internationales, Armand Colin, Coll. U Science Politique,
2011, p.121.
« Bellum omnium contra omnes » est la description que Thomas Hobbes donne à l’existence humaine
dans l’expérience de l’état de nature qui le conduit au Léviathan. T. Hobbes, Leviathan, 1651, p.62.
25
26
J.J Roche, Théorie des Relations internationales, Montchrestien, 2004, p.33.
9
trois pour définir des règles communes est connue depuis le XVIIe siècle »27, « lors de
grandes conférences diplomatiques qui vont fonder les ordres européens successifs, de la
paix de Westphalie (1648) au Congrès de Vienne (1814) »28. Néanmoins, elle s’est
institutionnalisée avec la création de la SDN (Société des Nations) et, plus encore, avec
la création de l'Organisation des Nations Unies (ONU) en 1945. Stergios Skaperdas a
démontré dans son article « On the Formation of Alliances in Conflict and Contests », que
la clé du renforcement de la sécurité internationale réside dans la mise en œuvre de
coopérations multilatérales. Pour ce faire, l’auteur prône la mise en œuvre des
coopérations militaires multilatérales, puisque « les effets des efforts communs sont
supérieurs à la somme des efforts individuels »29. Elles permettront en outre dans un
monde unipolaire, d'influencer les politiques de défense des États tiers selon Stephanie
G. Neuman30. C’est pourquoi, Han Dorussen, Emil J. Kirchner et James Sperling voient
dans ce type de coopération, la possibilité pour les Etats européens d’atténuer le fardeau
du coût qui leur est imposé individuellement. Selon eux, c’est la coopération sécuritaire
multilatérale qui permet aux Etats membres de supporter le coût de la gouvernance
sécuritaire grâce au partage de ce fardeau entre eux. En outre, d'un point de vue
opérationnel, les coopérations multilatérales ont vocation disent-ils, sur le long terme à
renforcer l'interopérabilité des forces armées, que ce soit sur le plan technique ou
culturel31. En revanche, pour Serge Michaîlof, toutes les agences multilatérales sont
caractérisées par une lourdeur bureaucratique qui entrave leur efficacité. Selon lui, elles
sont « soumises à un très grand nombre de tutelles qui sont toutes soucieuses du bon
27
Voir à ce sujet Alexandra de Hoop Scheffer, Alliances militaires et sécurité collective, dans Bertrand
Badie (dir.), Le Multilatéralisme, Paris, La Découverte, 2007, pp. 57-72.
28
G. DEVIN, « Les Etats-Unis et l'avenir du multilatéralisme », Cultures et conflits n°51, 2013, p.157.
29
S. SKAPERDAS, On the Formation of Alliances in Conflict and Contests, Public Choice, 1998, p. 25-42.
30
S. G. NEUMAN, « Power, Influence, and Hierarchy : Defense Industries in a Unipolar World », Defence
and Peace Economics, 1/21, 2010, pp. 105-134.
31
Han Dorussen, Emil J. Kirchner et James Sperling, « Sharing the Burden of Collective Security in the
European Union », International Organization, 4/63, 2009, pp. 789-810.
10
emploi de leur fonds »32. Pour l’illustrer, Niagalé Bagayoko a dépeint, dans un rapport du
projet « Stabiliser le Mali », comment le multilatéralisme sécuritaire peine à être efficace
en Afrique. Pour lui, « la réactivation de la Force Multinationale Mixte (FMM) dans le
cadre de la Commission pour le Bassin du Lac Tchad (CBLT) tout comme la création du
G5 Sahel et de sa Force conjointe ont indéniablement ajouté à la fragmentation
institutionnelle qui caractérise le multilatéralisme au sein de l’espace sahélien »33. Pour
Philippe Moreau-Desfarges, le multilatéralisme est simplement en train de s’essouffler
surtout en matière de sécurité et de défense. Il serait aujourd’hui même en crise34
-
La tendance bilatérale
Enfin, la troisième tendance dite bilatérale est reconnue par excellence pour sa plus
grande flexibilité selon Gabriella Blum35. Le politologue américain John Gerard Ruggie
a, dans son article intitulé Multilateralism : The Anatomy of an Institution , démontré la
capacité d’adaptation du bilatéralisme au cas par cas, quel que soit le choix du partenaire
ou le contenu des accords36. Pour l’auteur, cette doctrine a été utilisée, en parallèle du
multilatéralisme tout au long du XXe siècle.
Notre étude s’appuiera sur la troisième tendance qui favorise à la fois un
contournement des blocages du multilatéralisme et une accélération de la mise en œuvre
de ce dernier. De plus, la plupart des Etats engagés dans une coopération multilatérale,
recourent presque tous aux coalitions régionales, bilatérales ou de coalitions ad hoc
S. Michaïlof, Bureaucratie assassine : pourquoi la lenteur des procédures de l’union européenne coûte
cher aux pays du Sahel dans leur lutte contre Boko haram ? 2016, URL Bureaucratie assassine : pourquoi
la lenteur des procédures de l'Union européenne coûte cher aux pays du Sahel dans leur lutte contre Boko
Haram | Atlantico.fr .
32
N. Bagayoko, Multilatéralisme sécuritaire africain à l’épreuve de la crise sahélienne, Centre FrancoPaix,
2019, p. 91.
33
34
« Le multilatéralisme et la fin de l'histoire », Politique étrangère, n°69, 2004, pp. 575-586.
35
G. BLUM, « Bilateralism, Multilateralism, and the Architecture of International Law », Harvard
International Law Journal, 2008, pp. 323-379.
36
R. J. GERARD, Multilateralism : The Anatomy of an Institution, art. cité, p. 57.
11
rassemblant ceux qui le désirent37. Enfin, parce que les accords bilatéraux entre Etats
ouest-africains voisins sont susceptibles d’accélérer la coopération régionale de défense
qui se veut à terme panafricaine.
Dans ces conditions, quelle problématique peut se dégager de ce sujet ?
« Une problématique peut se définir comme une question qui exprime et explicite
les préoccupations en termes de vide à combler, de manque à gagner par rapport à la
connaissance et aux enjeux du sujet »38 . Le problème posé par la présente étude est celui
de l’efficacité de la coopération entre les armées de l’air nigériane et béninoise face aux
défis sécuritaires communs du moment. Commencée en 1979, elle a drastiquement
diminué à partir de 2007, bien que les années suivantes aient été marquées par
l’émergence de groupes armés menaçant ces deux pays, tels que le Mouvement pour
l’Emancipation du Delta du Niger (MEDN) et Boko Haram39. Aussi, ces deux armées
peinent-elles à conjuguer leurs efforts pour procurer l’observation aérienne et l’appui feu
nécessaires à la réussite des opérations menées par leurs marines nationales respectives,
engagées dans une coopération pour la lutte contre la piraterie maritime notamment dans
la « Zone E »40. Dès lors, il se pose la question de l’efficacité de ces deux composantes
aériennes destinées à soutenir les forces de surface engagées dans la lutte contre les fléaux
régionaux communs. Ainsi, vieille de 42 ans, cet engagement bilatéral nécessite une
relecture sous le prisme des dynamiques mondiales en cours et des nouveaux contextes
sécuritaires régionaux. La relecture envisagée devrait donc permettre « d’optimiser les
points forts » et « d’atténuer les faiblesses ».
D. KEOHANE, « Coopération militaire et défense nationale au sein de l’Union Européenne », Afrique et
Francophonie, ASPJ, 2018, p.5.
37
Professeur M. ADAMOU, cours sur l’initiation méthodologique à la rédaction d’un mémoire, Ecole
Nationale Supérieure des Armées, Porto-Novo, 22 mars 2021.
38
Ce groupe, proche d’Al-Quaïda et jugé trop extrémiste par l’Etat Islamique, est dirigé depuis la mort de
Mohamed Yusuf en 2009 par Abubakar Shekau, lui-même décédé en mai 2021.
39
40
Zone maritime regroupant le Bénin, le Niger, le Nigéria et le Togo.
12
A cette question, l’hypothèse centrale proposée est la suivante :
Hypothèse centrale : La coopération militaire entre l’AAB et la NAF, dynamique
à ses débuts, s’est progressivement affaiblie au fil des années.
Sous-hypothèse 1 : La coopération militaire en matière aérienne entre le Bénin et
le Nigéria est un enjeu majeur pour les deux Etats.
Sous-hypothèse 2 : La dynamisation de la coopération entre les armées de l’air
des deux Etats passe par la formalisation de cette coopération et une réadaptation aux
défis sécuritaires sous régionaux actuels.
Etant donné que les questions qu’elle aborde sont d’ordres stratégique et militaire
et prennent à la fois en compte les questions internes et externes, la présente étude est
mixte : quantitative et qualitative. La population cible est constituée des militaires ainsi
que des acteurs stratégiques chargés de la mise en œuvre de la coopération militaire
(délégués militaires, diplomates, coopérants militaires, personnels militaires bénéficiaires
d’action de formation).
La démarche méthodologique adoptée s’articule autour de quatre grandes phases :
la revue documentaire, l’analyse rétrospective ; les entretiens ; le traitement et l’analyse
des informations.
La phase de documentation a consisté à parcourir et exploiter toute la
documentation nécessaire disponible pour comprendre le sujet et mieux orienter les
analyses. Pour y parvenir, nous avons visité les structures ci-après : Bibliothèque
Nationale, Ambassade de la République Fédérale du Nigéria, Ministère des Affaires
Etrangères et de la Coopération (MAEC), Direction de la Coopération Militaire et des
Opérations de Paix (DCMOP) du Ministère de la Défense Nationale (MDN), Etat-Major
Général (EMG), Etat-Major de l’Armée de l’Air (EMAA). Dans ces services et centres
de documentation, nous avons collecté la littérature scientifique et grise, les accords de
coopération et plusieurs autres documents utiles. Cette documentation nous a permis de
procéder à une revue de littérature sur le sujet.
13
Par la suite, nous avons procédé à une analyse rétrospective de la coopération
militaire entre le Bénin et le Nigéria. Pour y parvenir, nous avons exploité les archives et
autres littératures grises pour retracer l’historique ainsi que les acquis de cette
coopération. Les interviews qui ont été menées dans le cadre de cette recherche sont des
interviews directes avec des personnes ressources : responsables anciens et actuels de la
hiérarchie militaire, responsables en charge de la coopération militaires, personnes
ressources ayant une connaissance du domaine militaire, délégués militaires ou exdélégués militaires au Nigéria, coopérants, diplomates.
Quant au traitement des données, il a été fait au moyen de la méthode descriptive
sur Excel. Les interviews ont fait l’objet d’une transcription et d’un recoupement.
L’analyse a été faite à travers la matrice du diagnostic stratégique de type SWOT (Force,
Faiblesses, Opportunités et Menaces).
Ainsi cette recherche s’articule essentiellement en deux parties.
La première partie est consacrée à un état des lieux de la coopération en mettant
en exergue dans le premier chapitre, l’historique et l’état des lieux de cette coopération,
en évoquant l’histoire de l’Armée de l’Air du Bénin (section 1ère) et l’état des lieux de la
coopération entre ces deux armées de l’Air (Section 2). Le deuxième chapitre traite de
l’analyse des Forces et Faiblesses, Opportunités et Menaces (SWOT) de cette coopération
en abordant les atouts et faiblesses de l’Armée de l’Air du Bénin (section 1) et les
opportunités nigérianes et leurs contraintes et facteurs de risques pour le Bénin (section
2).
La seconde partie, traite de la multiplicité des enjeux et les perspectives de
coopération fructueuse pour le Bénin et le Nigéria. Pour ce faire, elle se penche d’une
part, sur les enjeux multipolaires (chapitre 3) en évoquant la nécessité d’appuyer les autres
forces de défense (section 1) et les enjeux de la participation aux opérations militaires
régionales (section 2) et d’autre part, les perspectives d’une coopération efficace (chapitre
4) tant sur la formation du personnel (section 1) que sur la maintenance des matériels
volants (section 2).
14
PARTIE I:
ETAT DES LIEUX
15
CHAPITRE 1: HISTORIQUE ET ETAT DES LIEUX DE LA COOPÉRATION
ENTRE L’AAB ET LA NAF
Les armées de l’air du Bénin et du Nigéria entreprennent depuis 1979, une
coopération directe, dynamique, dégressivement entretenue et légitimée par les accords
de la CEDEAO.
Section 1: Brève historique de l’Armée de l’Air du Bénin
L’Armée de l’Air du Bénin41 (AAB) est une composante des Forces Armées
Béninoise (FAB) héritières de l’Escadrille Nationale, des Transports Aériens du Bénin
(TAB), et des Forces Aériennes. Créée le 1er septembre 1961 sous la dénomination d’un
« Bureau Air » appelé « Escadrille Nationale », elle a connu quatre (04) mutations
importantes, réparties sur deux périodes majeures : la période allant de 1961 à 1990 et
celle allant de 1990 à 2020.
Paragraphe 1: L’organisation de l’Armée de l’Air de 1961 à 1990
Les trois (03) premières décennies de l’existence de l’AAB sont celles au cours
desquelles, cette composante changea trois (03) fois de dénomination et disposa d’une
flotte utilitaire importante d'origine diverse. Cette période sera marquée par l’acquisition
en 1961 d’un premier appareil immatriculé TY- AAA au Dahomey42, notamment l’ « AeroCommander 5008 ».
En effet, en 1982, l’« Escadrille Nationale », fusionna avec la compagnie
nationale civile « Air Bénin » pour donner naissance aux « Transports Aériens du Bénin »
(TAB). Cinq ans après, en 1987, elle changea une nouvelle fois de dénomination pour
devenir les Forces Aériennes du Bénin, une quatrième composante des Forces Armées
Béninoises.
41
Quatrième composante des FAB en vertu de la loi 2020-15 du 03 juillet 2020, modifiant et complétant
la loi n°90-016 du 18 juin 1990 portant création des Forces Armées Béninoises.
42
Ancienne appellation du Bénin.
16
La plus belle période d’activités aériennes de cette unité a été celle d’avant le
renouveau démocratique, pendant la période socialiste du pays43. Un projet d’acquisition
d’avion de chasse de type MIG-21 avait alors été entrepris et la ville de Cana, identifiée
pour accueillir cet ambitieux projet de coopération soviétique. Ainsi, la Base Aérienne de
Cana a été entièrement construite par les russes et des pilotes de cette machine, formés
par la coopération soviétique. Au terme de la construction de la piste d’atterrissage de
cette base, l’AAB avait acquis une certaine expérience aéronautique grâce à l’exploitation
d’une gamme variée d’aéronefs. Elle disposait d’une flotte relativement dense. Plusieurs
avions dont une Corvette, une dizaine d’avion C-47 "Dakota", trois MH M "Broussard",
quelques Fokker 27 et 28, deux (02) avions Antonov AN-26, deux (02) Antonov AN-2, un
Falcon 50 offert par la Lybie, deux avions Dornier Do 28 offerts par le Nigéria44 et deux
hélicoptères de type Eurocopter AS350 B "Ecureuil" ont été exploités. Si cette armée
n’était pas pleinement engagée dans les opérations militaires pendant cette période, elle
disposait gracieusement cependant du strict minimum d’équipements militaires en bon
état avec un plan de maintenance adéquat. Ceci en vertu de magnanimes accords de
coopération visant à soutenir la rivalité entre les superpuissances.
Mais à partir de 1990, l’on assistera à une diminution de cette flotte et à
l’interruption du projet russe d’avions de chasse. Ainsi, au départ de la coopération russe,
les Forces Aériennes45 ne disposaient plus que des deux hélicoptères légers mono-turbine
et d’un seul avion monoplan utilitaire bimoteur "Twin Otter" de dix-neuf (19) places en
état de vol. C’est le début d’une nouvelle ère pour cette armée.
Paragraphe 2: L’Armée de l’Air du Bénin de 1990 à 2020
La période de 1990 à 2020 sera caractérisée par une intensification de la
coopération avec les pays européens, une baisse d’activités aériennes, une succession
De 1974 à 1990, le pays a connu le régime socialiste le plus virulent d’Afrique gouverné par un parti
d’inspiration Marxiste-Léniniste.
43
44
URL: https://aerophile.over-blog.com/article-les-forces-aerienne-beninoises-en-1994-91156853.html,
consulté le 20 mai 2021 à 23 :51 :17 .
45
Les TAB ont été transformées en Forces Aériennes du Bénin en 1987.
17
d’insatisfaisantes acquisitions de matériels volants et un dernier changement de
dénomination.
Avec l’avènement du renouveau démocratique dans le pays, un changement
d’ « aéropolitique »46 intervint. L’on a ainsi assisté à une réorientation de la coopération
militaire vers l’Europe de l’ouest et une baisse drastique des missions aériennes.
L’insuffisance de ressources dédiées à la formation, à l’entretien et à l’opérationnalisation
des personnels, a progressivement condamné les aviateurs à l’utilisation de matériels
d’occasion et accentué leur dépendance technique vis à vis des partenaires étrangers. En
effet, les enjeux nationaux ayant changé à partir de 199047, le renouvellement de la flotte
n’était plus une priorité et les missions de l’AAB, réduites à quelques rares tâches
logistiques, puis à celles communes à toutes les armées.
C’est ainsi qu’en 2002 cette armée a été dotée de trois avions HS-748 Hawker
Siddeley retirés du service dans l’Armée de l’Air belge après vingt-six (26) ans
d’exploitation. L’un de ces avions devrait servir de pièces détachées aux deux autres.
Mais moins de dix (10) ans après, l’un de ces deux avions de transport opérationnels a été
transformé en pièces détachés au profit du second immatriculé TY-21A, lequel sera aussi
arrêté de vol en 2015. Quant à l’avion DHC-6 Twin Otter, acquis en 1981 à l’état neuf, il
a été arrêté de vol deux ans plus tôt en 2013 et est actuellement redevable d’une grande
révision.
L’aéropolitique se comprend comme la politique de stratégie aérienne adoptée par un Etat en fonction
des possibilités que lui offre ses moyens aéronautiques militaires ainsi que l’orientation des alliances et
partenariats transnationaux entrant dans ce cadre.
46
Le régime marxiste-léniniste dans lequel le pays s’était engagé en 1974 a été défait lors de la conférence
des Forces Vives de la Nation en 1990.
47
18
Image 1 : Un avion HS-748 du Bénin
Source : Base Aérienne de Cotonou, cliché 2012.
Cinq ans après, soit en 2007, un avion Boeing 727 destiné au transport "VIP"48, a
été acquis auprès de la compagnie Iberia. Cette machine sera plusieurs fois clouée au sol
pour défaut de composantes aussi basiques que « l’eau méthanol » pourtant réalisable sur
place49. Suite aux récurrentes difficultés d’entretien de cet aéronef, il sera finalement
troqué en 2016 en Afrique du Sud au profit d’une version plus récente. Qualifiée « non
conforme aux normes internationales en vigueur » par l’Agence Nationale de l’Aviation
Civile (ANAC) après sa réception et son vol inaugural le 05 avril 2016, cette dernière
sera retournée en Afrique du Sud50.
Les VIP « Very Important Personalities » sont les autorités politico-administratives d’un pays. Ce terme
inclue également les membres du haut commandement militaire constitué des Chefs d’Etat-Major
d’Armées.
48
49
Entretien avec un ancien Chef d’Etat-Major des Forces Aériennes, à Cotonou le 12 avril 2021.
Y. SOMALON et G. DJIMIDO, « Inspection du nouvel aéronef acquis par l’ex-chef d’Etat : Toute la vérité
sur le Boeing 727 », Journal « l’Evènement précis » du 02 mai 2016. URL L'événement Précis – Inspection
50
19
Par ailleurs, avec la montée de l’insécurité maritime dans le Golfe de Guinée,
devenue un véritable problème régional qui menace, à court terme, le commerce
mondialisé et, à moyen et long termes, la stabilité des pays riverains dont le Bénin, deux
avions légers d’observation ont été commandés auprès d’un jeune constructeur français.
En effet, l’International Crisis Group51 avait recommandé aux gouvernements des Etats
du golfe de Guinée (Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin, Nigéria, Cameroun, Guinée
équatoriale,
São
Tomé-et-
Principe,
Gabon,
Congo-Brazzaville,
République
démocratique du Congo et Angola) de faire de la lutte contre la criminalité maritime une
priorité52. Ainsi, dans le but d’appuyer les opérations maritimes par des missions
d’observation aériennes, le Bénin a commandé en 2011, en qualité de premier acquéreur,
deux avions légers LH-10 « Grand Duc ». Malheureusement en 2013, quelques semaines
après la réception de la première machine immatriculée TY-25A, un contentieux lié au
contrat d’acquisition, le clouera au sol. Malgré les nombreuses propositions faites par le
constructeur à l’AAB, la machine ne sera pas remise en vol et la livraison du second sera
suspendue.
En ce qui concerne les hélicoptères, leur exploitation au sein de l’AAB n’a pas été
moins éprouvée. En effet, suite à l’indisponibilité technique ayant conduit à l’arrêt de vol
le 02 janvier 2007 de l’Eurocopter AS-350 B «Ecureuil », alors seul hélicoptère
disponible, l’expérience d’acquisition d’aéronefs belges usagés sera rééditée. Ainsi cette
même année, cinq (05) hélicoptères Agusta A-109 BA dont un (01) en réserve pour servir
de pièces détachées seront acquis auprès de la composante aérienne de l’armée belge.
Cette fois-ci, le contrat inclut outre la qualification des pilotes nationaux sur cette
machine, la formation initiale et complète d’un officier pilote sur cet hélicoptère. Une fois
encore, six ans après, tous ces hélicoptères ont été arrêtés de vol.
du nouvel aéronef acquis par l’ex-chef d’Etat: Toute la vérité sur le Boeing 727 (levenementprecis.com),
consulté le 22 mai 2021 à 14 :47 :53.
ONG internationale basée à Bruxelles et chargée de prévenir et d’aider à résoudre les conflits meurtriers
et les guerres.
51
52
Group, International Crisis, « LE GOLFE DE GUINEE : LA NOUVELLE ZONE A HAUT RISQUE », Rapport
Afrique N°195, 2012, p. ii.
20
Image 2: Pilote d'hélicoptère A-109 du Bénin en formation en Belgique.
Source : Interne, cliché en date du 12 février 2012.
Une autre insatisfaisante acquisition du matériel volant survint en 2014 avec
l’achat par la République du Bénin d’hélicoptères Agusta Westland AW-139. Aéronef
italien de nouvelle génération, l’AW-139 a été acquis par le Bénin à l’instar de plusieurs
pays voisins. Encore utilisé par l’Armée de l’Air du Nigéria, du Burkina-Faso, du Sénégal
et de la Côte d’Ivoire notamment pour le transport VIP, il n’aura servi que moins de deux
(02) ans au Bénin. C’est dans le cadre des recherches pétrolières, que le constructeur
italien Agusta Westland avait livré en 2014 et en 2016 à la Société Béninoise des
Hydrocarbures (SOBEH) deux (02) hélicoptères AW-139 flambant neufs53. Si à l’époque,
ces machines ne faisaient pas partie du patrimoine de l’Armée de l’Air, ce sont des pilotes
et mécaniciens hélicoptères de l’Armée de l’Air qui ont régulièrement été sollicités pour
53
Entretien avec un pilote militaire à Cotonou, le 19 avril 2021.
21
les exploiter. Après seulement 293 heures de vol à l’intérieur du pays, le premier
hélicoptère immatriculé civile TY-ABC, subit un crash à Djougou le 26 décembre 2015
alors qu’il transportait le premier ministre Lionel ZINSOU. L’immatriculation à titre
provisoire et la mise en service en 2016 de la seconde machine encore neuve sous
emballage, n’aura duré que quelques semaines, le temps du changement de régime
politique. Cette machine, immatriculée civile TY-SBH est alors arrêtée de vol depuis avril
2016. Reversée au patrimoine des Forces Armées Béninoises, elle attend indéfiniment
une remise en vol prochaine. Ainsi, l’Armée de l’Air demeurera dépourvue d’hélicoptère
en état de vol et ses pilotes militaires, maintenus en inactivité depuis ce malheureux
accident dû à une défaillance technique54. Aujourd’hui, outre le nouvel avion MA-600
immatriculé TY-BDR, acquis en 2020 auprès de la République Populaire de Chine, les
quelques vecteurs aériens dont dispose l’Armée de l’Air du Bénin sont tous cloués au sol.
En ce qui concerne les effectifs réalisés et les pourcentages, l’on note une faible
proportion de personnels naviguant et technique contre une forte proportion de personnels
sans spécialité, majoritairement des aviateurs du rang. Seuls 1.58% sont des Personnels
Navigants, 6,11% non navigants spécialistes contre 55,11% ceux des services généraux
puis 37,2% sans spécialité55.
Sur le plan organisationnel, l’AAB est dotée d’une organisation et d’un format
perfectibles nécessitant la mise en œuvre de nouveaux partenariats et de profondes
réformes pour la rendre plus sure, utile et rentable pour la nation.
En effet, à l’instar des autres composantes des Forces Armées Béninoises, elle
dispose d’un Etat-Major à trois (03) divisions, d’un service rattaché, le Service du
Commissariat de l’Air et de quelques organismes formant corps. Il s’agit du Groupement
Hors Rangs (GHR)56, du Centre d’Instruction des Fusiliers Commandos de l’Air
(CIFCA), des Bases Aériennes de Cotonou (BACO) et de Cana (BACA), de la Base
54
Conclusion du rapport d’enquête.
55
Division des Ressources Humaines de l’Etat-Major de l’Armée de l’Air, 2020.
Unité en charge de la gestion des personnels de l’Etat-Major de l’Armée de l’Air et ceux détachés auprès
des organismes interarmées.
56
22
Logistique de Parakou (BALPA), du 1er Escadron d’Avions de Transport (1er EAT) et du
1er Escadron d’Hélicoptères (1er EH)57. Des trois Bases Aériennes dont elle dispose, seule
la Base Aérienne de Cotonou58 est dotée d’aéronefs. La BACA, activée pour la première
fois en 2012, partage ses installations avec le 1er Bataillon d’Artillerie Mixe (1er BAM) et
le Centre de Formation aux Opérations de Maintien de Paix (CFOMP). Quant à la
BALPA, on attend toujours son activation puisque les infrastructures militaires
nécessaires à son opérationnalisation n’ont jamais été construites.
Figure 1: Organigramme de l'Armée de l'Air du Bénin
Source : Etat-Major de l’Armée de l’Air du Bénin.
Le 1er EAT et le 1er EH sont deux unités nées de l’éclatement en 2013, de l’Escadron de Transport Mixe
(ETM) de la Base Aérienne de Cotonou.
57
La Base Aérienne de Cotonou occupe l’aile Sud-Est de l’Aéroport International Cardinal Bernadin
GANTIN de Cotonou.
58
23
Image 3: Une prise d'armes à la BACO
Source : Base Aérienne de Cotonou, cliché 2020.
Section 2: Etat des lieux de la coopération militaire entre l’AAB et la NAF
Les armées de l’air béninoise et nigériane entreprennent dès 1979, une coopération
directe, dynamique, dégressivement entretenue59 par manque d’intérêts communs et
légitimée par les traités organisant un système de sécurité collective au sein de la
CEDEAO.
Paragraphe 1: Une coopération structurelle en déclin
L’idée d’assistance et d’entraide entre armées des pays d’Afrique de l’Ouest a
germé après la création à Lagos le 28 mai 1975 de la CEDEAO, une organisation qui
regroupait à l’époque seize (16) Etats membres. Cette organisation économique, dont sont
tous membres le Nigéria et le Bénin, s’est très tôt préoccupée des problèmes relatifs à la
sécurité des Etats qui la composent.
En effet, dès novembre 1976, soit un an et demi après sa création, la Conférence
des Chefs d’État et de Gouvernement a adopté une résolution invitant à l’élaboration d’un
59
Entretien avec officier supérieur nigérian à Cotonou, le 14 avril 2021.
24
traité de non-recours à la force. Sur cette base, un Protocole de Non-Agression est signé
le 22 avril 1978 à Lagos, et un Protocole d’assistance mutuelle en matière de défense fut
adopté le 29 mai 1981 à Freetown. Le Protocole de Non-Agression, fait interdiction aux
États membres de recourir à l’agression, à la subversion et à toute autre forme d’emploi
de la force dans les relations entre États membres60. Il prévoit un système de règlement
politique pour les différends qui viendraient à naître entre eux. Quant au Protocole
d’assistance mutuelle en matière de défense, il organise un système de sécurité collective
qui implique que les États membres se prêtent mutuellement main forte pour leur défense
contre toute agression dont un des leurs est l’objet par un État tiers61. Il en est de même
dans le cas où un conflit armé interne à un État membre est soutenu et entretenu
activement de l’extérieur. Cependant, une des faiblesses des actions de cette organisation
face aux conflits modernes est qu’il n’y a pas lieu à intervention des forces armées de la
CEDEAO si le conflit reste purement interne62. « Suite aux changements et aux nouveaux
mandats de la Communauté, un Traité révisé a été signé à Cotonou, en République du
Bénin, en juillet 1993 par les chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO composée
désormais de quinze (15) Etats membres après le départ de la Mauritanie »63. Partant de
ce cadre juridique légitime qu’offre la CEDEAO, le Nigéria et le Bénin ont entrepris
plusieurs projets de coopération dans divers domaines avant leurs élargissements au
secteur de la défense. Il s’agit notamment du domaine économique à travers la Société
Sucrière de Savè (SSS), la Cimenterie d’Onigbolo,64 mais aussi un projet porté par le feu
F. M. DJEDJRO, La guerre civile du Libéria et la question de l’ingérence dans les affaires intérieures des
états, Revue belge de droit international, Editions BRUYLANT, Bruxelles1993/2, p.405.
60
61
Ibid, p.413.
Un conflit qui oppose, sur le territoire d’un seul Etat, les forces armées régulières à des groupes armés
dissidents, ou des groupes armés entre eux.
62
63
Le nombre d’Etats membre est passé à quinze (15) après le départ de la Mauritanie.
Ces deux projets ont été lancés suite au décret n°86-309 du 5 Août 1986 portant création d’un comité
interministériel chargé d’étudier les conditions de commercialisation, au Nigéria, du sucre de la Société
Sucrière de Savè (SSS) et du ciment de la Société des ciments d’Onigbolo.
64
25
professeur Albert TEVOEDJRE65 pour l’enseignement de la langue française par des
béninois aux nigérians.
En ce qui concerne la coopération militaire, elle a véritablement débuté par une
assistance du Nigéria aux lendemains de l’agression aérienne du 16 janvier 197766. En
effet, « plusieurs patrouilles ont été organisées sur ordres du président nigérian Olushegun
Obasandjo, par la marine nigériane sur les côtes béninoises afin de protéger le pays contre
une éventuelle nouvelle agression par la mer »67. Aussi, dans le cadre du projet
linguistique, plusieurs officiers nigérians en stage au Centre Béninois des Langues
Etrangères (CEBELAE), ont-ils été confiés au Général Basile C. DADELE, alors
Capitaine, pour des modules de cours sur les terminologies militaires. L’enseignement
des terminologies militaires aéronautiques était exclusivement dédié aux professionnels
nigérians de l’aéronautique appelés à interagir lors des missions aériennes avec les
francophones. C’est en échange de cette offre que les FAB ont commencé par envoyer
des officiers béninois au cours d’instructeur de langue anglaise au Nigéria.
Pour ce qui concerne particulièrement la coopération bilatérale entre les Armées
de l’Air, elle a débuté en 1979 par l’envoi de neuf (09) lauréats des tests
psychotechniques68 en formation dans les écoles de la NAF. Sortis brevetés en 1981, les
trois (03) pilotes de transport et six (06) mécaniciens, ont constitué les premiers
bénéficiaires de cette coopération naissante. Suite au tragique accident survenu le lundi
16 novembre 1981, à l’aéroport international Murtala Muhammed de Lagos de
l’Aérospatiale Corvette des Transports Aériens du Bénin (TAB)69 immatriculé TY-BBK,
cette coopération est devenue plus dynamique. En effet, selon le témoignage d’un
65
Une des plus éminentes figures intellectuelles du Bénin, décédé le 06 novembre 2019 à l’âge de 90 ans.
66
Le 16 janvier 1977, Bob DENARD a dirigé une invasion de mercenaires contre le régime du Président M.
KEREKOU. Dénommée opération « crevette », les mercenaires étaient venus par les airs.
67
Entretien avec un ancien Chef d’Etat-Major des Forces Aériennes le 08 mai 2021 à Cotonou.
68
Organisées tous les deux ans par la coopération française, les tests psychotechniques constituent la
seule voie de recrutement des professionnels de l’aéronautique dans les FAB.
L’escadrille militaire nationale et la compagnie « Air Bénin » avaient déjà pratiquement fusionnée pour
former les Transports Aériens du Bénin. L’immatriculation civile de cet avion avait alors été transformée
en immatriculation militaire TY-BBK.
69
26
responsable militaire de l’époque, « le positionnement des unités d’artillerie nigériane à
la frontière avec le Bénin justifié par l’ingérence des anciennes colonies sous influence
française dans la guerre civile nigériane70, ajoutée à l’expérience et aux qualités
professionnelles des deux pilotes FAVI Innocent Jean-Baptiste et KANHONOU
Augustin qui étaient aux commandes de l’avion71, avaient laissé court à des spéculations »
malgré les résultats officiels de l’enquête qui ont révélé une défaillance technique72.
Image 4: L’Aérospatiale Corvette immatriculé plus tard TY-BBK
Source : aerophile.over-blog.com, Jacques Moulin, cliché 1994.
70
Entretien à Cotonou avec un Officier Supérieur des Forces Aériennes à la retraite, le 04 juillet 2021. « Le
Nigéria faisait partie des pays non alignés, luttant contre l’Apartheid et considérés comme pays de la ligne
de front. Pour cette raison, les pays capitalistes ont tout fait pour ruiner l’économie. Ce qui a conduit à
une crise économique sérieuse dans les années 80 conduisant au coup d’Etat du Général Buhari ».
71
Décret n° 1981-395 du 19 novembre 1981 portant création de la commission technique spéciale chargée
de l'enquête sur l'accident survenu à l'avion Corvette de la Société Nationale de Transports Aériens Air
Bénin le lundi 16 Novembre 1981.
72
Entretien avec un ancien Chef d’Etat-Major des Forces Aériennes à Cotonou, le 08 mai 2021.
27
Ainsi, la vitalité des échanges entre ces armées a abouti à la promesse de don de
deux avions de type Dornier Do-28 et à l’offre de formation d’une deuxième vague de
personnels béninois, constituée de quatre (04) officiers et deux (02) sous-officiers, à
l’école des officiers ingénieurs de Kaduna. En joignant l’acte à la parole, la NAF a
également assurée la qualification de cinq (05) pilotes dont un (01) Commandant De Bord
(CDB) et sept (07) techniciens sur ledit aéronef.
Image 5: Un des deux avions Dornier Do-28 offerts par le Nigéria
Source : aerophile.over-blog.com, Jacques Moulin, cliché 1994.
Malheureusement, au terme de l’assistance technique nigériane mise à disposition
du Bénin, les offres de formation ainsi que les échanges entre les Armées de l’Air du
Bénin et du Nigéria sont interrompus. Malgré, « la visite de travail au Nigéria conduite
quelques années après, en 1988 par le Général Seydou MAMA SIKA, alors Commandant
et Commandant des Forces Aériennes (COFA), pour rétablir le contact, aucune
amélioration significative n’aura été apportée aux relations entre ces deux armées de
28
l’air »73. Il a fallu attendre l’année 2007 pour que six (06) places de formation initiale de
sous-officiers techniciens aéronautiques soient accordées au Bénin par l’Armée de l’Air
nigériane. Cette fois-ci, « cette coopération est entretenue par l’ambassade de la
République Fédérale du Nigéria à travers des échanges officiels entre l’attaché de Défense
au Bénin et le Sous-chef d’Etat-Major du Bénin, chargé des Relations Internationales »74.
La dernière offre de formation au profit de l’AAB date de 2012 et est constituée d’une
place de formation d’un (01) officier des services généraux. Aujourd’hui, les actions de
coopération militaire entre ces armées se résument essentiellement à des offres de places
de formation communes aux armées telles que le Diplôme d’Etat-Major (DEM), et
l’Ecole de Guerre (EDG) au profit des personnels béninois et des voyages d’étude
d’officiers nigérians de l’Académie Nationale Interarmées d’Etat-Major de Jaji en
République du Bénin.
Tableau 1 : Places de formation offertes par la NAF à l’AAB ( de 1979 à 2012) .
FORMATION
1979 1982
1986
EDG
2003
2007
01
DEM
OFFICIERS
03
PILOTES
OFFICIERS
06
INGENIEURS
OFFICIERS DES
SERVICES
COMMUNS
QUALIFICATION
SUR DO-28
SOUS-OFFICIERS
BE/BS AVION
TOTAL
2012
01
OBS
02
03
04
10
01
12
06
TOTAL
02
02
06
12
01
12
02
09
2008
01
08
7 pilotes
05
Mécaniciens
08
01
01
38
Source : Division des ressources humaines de l’Etat-Major de l’Armée de l’Air.
73
Entretien avec un Général de Division Aérienne à Abomey-Calavi, le 20 juin 2021.
74
Entretien avec un officier supérieur des FAB, le 14 avril 2021 à Cotonou.
29
Ainsi, pendant quarante-deux (42) ans de coopération, les formations offertes par
la NAF au profit des personnels de l’AAB ont eu une évolution en « dents de scie » avec
un pic en 1986, année où cette armée a reçu le don de deux (02) avions Dornier Do-28 de
la NAF. Ces offres de formation ont connu une baisse drastique à partir de l’année 2007
et une interruption en 2013. Au total, trente-huit (38) formations dont trente-trois (33)
spécialisées (23 techniques et 10 pour pilotage) et cinq (05) communes aux armées ont
été offertes par la NAF aux aviateurs béninois. Leur répartition est illustrée par la figure
ci-après.
Figure 2: Répartition des formations offertes par la NAF à l’Armée de l’AAB
Evolution des formations offertes par la NAF à l'AAB
14
40
12
35
30
10
25
8
20
6
15
4
10
2
5
0
0
1979
1982
1986
2003
2007
2008
2012
EDG
DEM
OFFICIERS PILOTES
OFFICIERS INGENIEURS
OFFICIERS DES SERVICES COMMUNS
QUALIFICATION SUR DO-28
S-OFFICIERS BE/BS AVION
TOTAL
TOTAL
Paragraphe 2: Une coopération opérationnelle qui peine à s’envoler
Le rôle des aéronefs opérationnels, est crucial dans la lutte contre les groupes
armés terroristes (GAT) en raison de l’étendue de la zone d’action de ces groupes, de leur
mobilité et de leurs modes d’action. Les pays menacés par le terrorisme transfrontalier
doivent donc se doter de moyens aériens nationaux autonomes et suffisants susceptibles
d’être employés dans un cadre national et multinational tels que les opérations du G5
30
Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad). Les Etats à moyens modestes
comme le Bénin devront quant à eux, compter sur le développement d’une Coopération
Militaire Opérationnelle-Air (CMO-AIR) pour surveiller et contrôler les lignes
d’opérations qui leur sont assignées. Ce n’est qu’ainsi qu’ils pourront accroitre leurs
capacités à renseigner (ISR)75, à transporter par les airs à travers l’aéromobilité et
l’évacuation sanitaire (EVASAN) puis remplir des missions d’attaques en soutien aux
forces de surface connues sous la dénomination de Close Air Support (CAS)76.
La coopération bilatérale entre les armées de l’air béninoise et nigériane qui
devrait s’y consacrer, a été particulièrement dynamique en ce qui concerne la formation
du personnel au détriment du volet opérationnel et tactique, handicapé par
l’indisponibilité de matériel adéquat au Bénin. Pourtant depuis plus d’une décennie, les
plus sérieuses menaces à la stabilité de ces deux nations voisines que sont le terrobanditisme et la piraterie maritime sont communes. Le militantisme du Delta du Niger a
certes vu officiellement la fin de son règne en 201477, mais « de nombreux actes de
brigandage perpétrés sur les plateformes maritimes nigérianes et béninoises sont
imputables aux combattants du Mouvement pour l’Emancipation du delta du Niger
(MEDN) »78 et depuis 2012 de l’IPOB (Indigenous People of Biafra). S’il est vrai que le
leader du mouvement indépendantiste du Delta du Niger, Alhaji Mujahid Asari-Dobuko
s’est fait naturaliser par les béninois en 2013 et renoncé au militantisme violent, il n’en
demeure pas moins que la synergie d’actions coordonnées qui devrait accroitre ensemble
la résilience du Bénin et du Nigéria face aux menaces sécuritaires n’a pu être effective
pour contribuer significativement à l’endiguement rapide du MEDN79. La vaste région
75
Intelligence, Surveillance and Reconnaissance.
76
Appui aérien rapproché.
Ambassadeur L. LASEINDE, "Elaboration d’une stratégie de sécurité nationale, étude de cas du Nigeria",
Centre d’Etudes Stratégiques de l’Afrique, 2020, p.2.
77
Echanges avec un officier supérieur de l’Armée de Terre à la retraite, ancien membre du haut
commandement militaire, le 08 avril 2021 à Abomey-Calavi.
78
79
Un mouvement militant nigérian qui lutte contre « l'exploitation et l'oppression des peuples » du delta
du Niger.
31
du Delta du Niger objet de la revendication du MEDN est constituée de neuf (09) Etats
riches dotées de réserves pétrolières estimées à 37 milliards de barils de pétrole brut en
201780. Elle a été un foyer d’une violente instabilité au Nigéria pendant les deux dernières
décennies81.
Contrairement à la NAF qui exploite les vecteurs tels que le « JF-17 Thunder
Fighter Jet », l’Alpha Jet, et l’A-29 « Super Tucano » dans la lutte anti-guérilla et celle
contre Boko Haram, le Bénin n’est pas à ce jour doté d’une aviation de chasse dont
l’exploitation consumerait son budget de défense. En revanche, ce pays a manqué
l’occasion d’introduire progressivement dans ses opérations, les drones militaires en tant
que moyens de reconnaissance et d’attaque depuis leur pleine utilisation par la NAF.
Tableau 2: Types de drones militaires utilisés par les Forces Armées nigérianes
Armée de l’Air
Armée de Terre
Marine Nationale
En construction au
Nigéria
Drones
militaires
(UAV)
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Tsaigumi drone
Amebo drone
Gulma drone
CH-3A UCAV
Star Tiltrotor
ADS Aerostar UAV
VTOL voilure fixe
Mugin commerciale
RQ-11 RUAV82
Star Tiltrotor
•
•
•
DJI Phantom
ADS Aerostar
•
RemoEye 002Bs
« Ichoku »
(Lancement
à main)
Source : Africanmilitaryblog.com83
80
T. M. EBIEDE, Instabilité dans le Delta du Niger : Programme Post-Amnistie et Consolidation de la Paix,
Friedrich-Ebert-Stiftung, 2018, p. 6.
81
Idem.
82
Raven Unmanned Aerial Vehicle
83
URL www.africanmilitaryblog.com/2020/10/nigerian-military-drones-uav-current-army-air-force-andnavy-uav-inventory consulté le 12 juin 2021 à 01 :45 :07
32
De même, les armées de l’air nigériane et béninoise ont plusieurs fois exploité les
mêmes types d’hélicoptères militaires sans qu’aucun entrainement ou manœuvre
opérationnelle conjointe n’ait véritablement pu être conduit. Il s’agit notamment des
hélicoptères Agusta A-109 et AW-139. Il en a été de même pour la formation de personnels
techniques, sur ces machines qui aurait pu garantir le maintien opérationnel de ces
aéronefs. En conséquence, bien que des solutions de maintenance existent dans les
structures militaires et civiles du Nigéria, l’AAB n’a pu maintenir longtemps en état de
vols ces hélicoptères.
33
CHAPITRE 2: ANALYSE DES FORCES ET FAIBLESSES, OPPORTUNITÉS ET
MENACES (SWOT) DE L’AAB ET DE LA NAF
Les Armées de l’Air béninoise et nigériane présentent chacune des Forces,
Faiblesses mais surtout de plusieurs atouts et opportunités aéronautiques exploitables
pour accroître la résilience de ces deux nations face aux menaces qui pour la plupart
restent communes.
Section 1:
Les atouts et faiblesses de l’AAB
Le Bénin a tant bien que mal eu le mérite en 2020 de contredire l’assertion selon
laquelle « lorsque le Nigéria éternue, le Bénin s’enrhume »84. En effet, les frontières
nigérianes ont été unilatéralement fermées par le gouvernement nigérian du 20 Août 2019
au 16 décembre 2020 afin de lutter contre la contrebande de riz, d’armes et de drogues.
Bien que les économies de ces pays soient intimement liées, les mesures d’atténuation
mises en place ont permis à l’économie béninoise de ne pas chanceler comme ce fut le
cas en avril 1984, lorsque le Président Muhammadou Bouhari arriva au pouvoir par coup
d’Etat. Cette résilience inédite du Bénin face au Nigéria témoigne de la capacité du pays,
à s’engager dans un partenariat fécond avec son grand voisin de l’Est. En dépit des
faiblesses de l’armée de l’Air du Bénin, elle dispose d’atouts aéronautiques exploitables
par la coopération bilatérale bénino-nigériane.
Paragraphe 1: Un personnel naviguant et technique qualifié mais longtemps
restés en inactivité
Au Bénin, le maintien en condition opérationnelle du personnel navigant et
technique ainsi que la mise à jour régulière des diverses qualifications et licences de vol
constituent un défi majeur pour les divers commandements. Ces personnels sont tous
recrutés par tests psychotechniques, et titulaires d’un baccalauréat scientifique ou sortis
des facultés des sciences et écoles techniques des universités nationales.
Intellectuellement prometteurs pour l’avenir scientifique du Bénin et diplômés de grandes
84
Assertion largement partagée au Bénin depuis les années 1990.
34
écoles étrangères, ils pourront être employés dans les Opérations de Maintien de Paix
(OMP), la surveillance et la collecte du renseignement ainsi que les opérations militaires
régionales. Restant souvent en inactivité aérienne pendant plusieurs années du fait de
l’indisponibilité de vecteurs aériens, ils constituent un atout précieux pour la coopération
avec la NAF notamment dans la formation des personnels, l’entretien des aéronefs et les
projets aéronautico-industriels.
En effet, au terme de leur formation initiale, les pilotes et techniciens militaires
passent de nombreuses années d’inactivité aérienne qui érodent progressivement leur
motivation et capacité. La plupart des aéronefs militaires restent cloués au sol du fait du
désengagement des partenaires internationaux des entretiens techniques coûteux, doublé
d’une réduction radicale des budgets de la défense. Cet état de chose qui date des années
1990 peine à être résolu à ce jour. Déjà, « au terme de la coopération aérienne russe, tous
les pilotes de chasse au Bénin ont dû subir une reconversion professionnelle. Plusieurs
ont continué leur carrière d’officiers à l’Armée de Terre, à la Marine ou encore à la
Gendarmerie Nationale »85. Les plus chanceux en terme d’activités aériennes ont été
reconvertis pilotes de transport ou d’hélicoptères au sein de l’Armée de l’Air du Bénin.
L’aéronautique n’étant pas développée dans le pays, la reconversion civile leur était
moins accessible. Ainsi, comme pris dans un « piège de l’aviateur béninois », les
personnels navigants se contentent d’une carrière de gestion administrative tandis que les
personnels techniciens sous-officiers qualifiés quittent simplement l’institution militaire.
Objets d’un traitement salarial moindre, ils sont enclins à des départs pour des horizons
plus prometteurs à leurs yeux. C’est ainsi qu’on a pu noter le départ pour diverses raisons
de quarante-quatre (44) sous-officiers techniciens qualifiés depuis 2000. L’absence de ces
personnels, parfois détenteurs uniques d’une compétence technique86, a hypothéqué
davantage le maintien opérationnel des aéronefs.
85
Entretien à Abomey-Calavi avec un pilote de chasse formé en Russie ayant passé toute sa carrière à
l’Armée de Terre, le 08 avril 2021.
86
Entretien avec un sous-officier de l’Armée de l’Air à Cotonou, le 12 mai 2021.
35
Une autre conséquence de l’inactivité aérienne au sein de l’AAB est
l’indisponibilité d’instructeurs pilotes et de Commandants De Bord (CDB)87 sur certains
aéronefs, tributaires de l’insuffisance d’heures de vols requis aux pilotes béninois. En
effet, généralement un pilote militaire obtient son brevet de pilote après cent cinquante
(150) à trois cent (300) Heures De Vols (HDV) alors qu’un minimum de mille cinq cent
(1500) HDV est requis pour devenir CDB88. Ainsi, de jeunes pilotes rentrés d’école de
formation initiale, fougueux de leur jeunesse, disposant encore de qualités académiques
à jour et disposés à servir l’AAB, sont maintenus en inactivité par manque d’instructeur
ou de CDB pouvant assurer leur qualification opérationnelle sur le vecteur en dotation au
sein de l’AAB89.
En conséquence, au départ à la retraite des anciens, ces pilotes devenus officiers
supérieurs, manquent d’expérience pour devenir CDB et ainsi conduire à leur tour, la
formation des jeunes.
Paragraphe 2: Un espace aérien et des aérodromes inexploités par l’armée faute
de moyens volants
Un des principes du droit international coutumier est la souveraineté de l’Etat sur
l’espace aérien surplombant son territoire terrestre. Elle est affirmée par la Convention de
Chicago qui stipule : « Les Etats contractants reconnaissent que chaque Etat a la
souveraineté complète et exclusive sur l’espace aérien au-dessus de son territoire90 ».
Cependant, les capacités limitées de transport aérien de l’AAB, entravent gravement
l’aptitude du pays à réagir face aux menaces transnationales, aux catastrophes naturelles
D’après l’Agence Nationale de l’Aviation Civile du Bénin, c’est le pilote désigné par l’exploitant ou par
le propriétaire dans le cas de l’aviation générale, comme celui qui commande à bord et qui est responsable
de l’exécution sûre du vol. L’évolution dans la carrière de pilote militaire n’étant pas liée à la
réglementation civile, ce quota horaire peut varier même si la majorité des armées de l’air du monde
tendent à s’y conformer. En ce qui concerne la qualification de Pilote Instructeur, elle nécessite un stage
dédié.
87
88
ANAC Benin, Règlementation Aéronautique Béninoise Licence de Pilote de Ligne R2-RAB-01- A, 2016,
p.95.
89
Aéronef utilisé par l’Armée de l’Air du Bénin.
90
Convention de Chicago, art. 1er .
36
et aux autres défis relatifs à la sécurité. Bien que la surveillance et la défense de l’espace
aérien soient ses principales missions, le « matériel majeur actuellement en dotation lui
permet d’effectuer très peu de missions militaires »91. De plus, n’exploitant que
faiblement son espace aérien, celui-ci est essentiellement utilisé par l’aviation civile et
contrôlé à travers l’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à
Madagascar (ASECNA), pourtant non autorisée et équipée pour faire face à une intrusion
hostile. Elle n’assure que la surveillance radar de l’espace par faute d’équipements
adéquats en dotation dans l’AAB.
La capacité des pistes d’atterrissage et les terminaux des aéroports de Cotonou
(DBBB)92 et de Parakou-Tourou93 sont adéquats en général mais les dispositifs de contrôle
du trafic aérien et de surveillance qui restent essentiellement civiles, nécessitent beaucoup
d’amélioration. Quant à celui de la Base Aérienne de Cana (DBBC), sa longue piste
d’atterrissage a la capacité d’accueillir des avions de chasse. En ce qui concerne les
nombreuses pistes d’atterrissage en latérite, elles sont faiblement exploitées et contrôlées
du fait de l’indisponibilité des aéronefs. Aujourd’hui au nombre de neuf (09), elles
constituent des portes d’entrée insuffisamment contrôlées. Il s’agit des pistes des
aérodromes de : Savè (DBBS), Parakou (DBBP), Djougou (DBBD), Bembèrèkè (DBBR),
Natitingou (DBBN), Porga (DBBO), Kandi (DBBK) et les pistes d’atterrissage du Park W
et de l’usine de la Nouvelle Cimenterie du Bénin (NOCIBE). Le pays peine ainsi à tirer
leçon de la seule et véritable attaque subie qu’est l’agression par voie aérienne du 16
janvier 1977, pour relever les niveaux d’équipement et de professionnalisation de l’armée
de l’air et ainsi accroître sa résilience face aux nouvelles menaces réputées pour leur
multiformité. Une mise en formation continue des personnels et leur maintien en activité
sont indispensables pour relever les défis sécuritaires contemporains de l’AAB au nombre
desquels figurent les situations crisogènes engendrées par le faible contrôle de
l’immigration irrégulière. En effet, malgré les efforts fournis par l’Agence Béninoise de
91
Entretien avec un officier supérieur de l’AAB à Cotonou le 16 avril 2021.
92
DBBB est le code attribué à cet aéroport par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI).
93
Nouvel aéroport est destiné à remplacer celui de Parakou-Wansirou dont le code OACI est « DBBP ».
37
Gestion Intégrée des Frontières (ABEGIEF) et l’Unité Spéciale de Surveillance des
Frontières (USSF), plusieurs immigrés empruntent les axes incontrôlés reliant le Bénin
aux pays limitrophes comme le Burkina-Faso, le Nigéria et le Niger tous en lutte contre
l’extrémisme violent et le terrorisme. C’est pourquoi le contrôle du flux migratoire mérite
davantage d’attention et le déploiement de grands moyens. Une surveillance plus accrue
au moyen d’aéronefs et de drones permettrait d’apprécier son importance et d’accroitre
le rendement de l’USSF dans la sécurisation des espaces frontaliers à l’instar de ce qui se
fait à la frontière mexico-américaine.
Image 6: Carte des aérodromes du Bénin.
NIGER
BURKINA-FASO
NIGERIA
TOGO
Source : openStreetMap Cliché 2021.
38
Plus particulièrement, la forte augmentation des naissances au Niger, pays où
l’espace habitable est restreint, fait du Bénin un candidat potentiel à accueillir par milliers
des immigrés en provenance de ce pays dans les prochaines années. La raison est qu’ « il
sera difficile au Niger, pays semi-aride, de nourrir une population qui va passer de 11
millions d’habitants en 2012 à 50 millions d’habitants en 2050 »94. Déjà des
communautés nigériennes deviennent de plus en plus nombreuses dans les régions de
Malanville et de Karimama95, créant même parfois des villages entiers d’immigrés à
l’image de leurs villages nigériens d’origine96. Les prévisions estiment que le phénomène
migratoire sera une des causes d’«un accroissement d’environ 54% de l’incidence des
conflits armés d’ici 2030 sur tout le territoire de l’Afrique subsaharienne97. Il est possible
au Bénin de juguler ces situations crisogènes persistantes par des missions de surveillance
aérienne des frontières conjointement menées avec les unités responsables sous l’égide
l’ABEGIEF. Toutefois, les engagements régionaux ratifiés98 par le pays l’oblige à
conformer sa politique de défense aux logiques développées par Joseph NYE, c'est-à-dire,
au « hard power », (ou la politique de puissance coercitive), d'une part, et au « soft
power », (ou la politique de puissance douce), exercées concomitamment99.
Compte tenu du niveau d’opérabilité de l’AAB, une mutualisation de ses moyens
et procédures opérationnelles avec ceux de la NAF serait susceptible de la rendre plus
apte en lui apportant les changements progressifs adaptés dont elle a besoin pour sa pleine
opérationnalisation.
94
L. A. TURNER, commentaires sur les perspectives internationales sur la santé sexuel et génésique. Niger
: trop peu, trop tard, 2012, p.1.
S. B. ALLAGBE, T.R. KADJEGBIN & G. GONZALLO, Enjeux socio-économiques de l’immigration, 2017,
p195.
95
96
N. BAKO-ARIFARI, cours intitulé « diplomatie de la paix », ENSA,15 mars 2021.
97
L. A. TURNER, Loc.cit, p.1.
98
La libre circulation des personnes et des bien prévaut au sein de la CEDEAO.
99
J. NYE, Bound to Lead: The Changing Nature Of American Power, New York, Basic Books, 1990, p.261.
39
En somme, les Forces, Faiblesses, Opportunités et Menaces de l’AAB peuvent se
résumer de la façon suivante :
Tableau 3: Matrice SWOT de l’AAB dans sa coopération avec le Nigéria.
FORCES
FAIBLESSES
Disponibilité des personnels qualifiés
Personnels inexpérimentés et démotivés
Disponibilité d’aérodromes militaires
Espace aérien inexploité
Proximité géographique avec Nigéria
Absence de centre de formation
Coopération existante
Formation du personnel dépendante des pays étrangers
Budget de défense réduit
Accords d’Assistance Militaire Technique avec la
France
OPPORTUNITES
RISQUES
Formation régulière du personnel
Domination nigériane
Entraînement sur simulateur de vol
Violation du secret défense
Maintenance du matériel à coût réduit
Présence permanente de la NAF
Transfert de compétence
Mise en cause d’accords de coopération militaires avec
les pays ne partageant pas les mêmes orientations
Mise en place d’une industrie de défense
Appui aux missions des forces de surface
(Armée de Terre et Marine Nationale)
Meilleure surveillance
terrestres et maritimes
des
frontières
Engagement d’aéronefs aux missions ONU
Acquisition d’expérience aéronautique aux
personnels
Immersion linguistique
40
Section 2: Les opportunités nigérianes, les contraintes et les facteurs de risque
Puissance démographique et militaire ouest-africaine, la République Fédérale du
Nigéria, fait partie des prochains pays émergeant du 21ème siècle connus sous l’acronyme
des MINT (Mexique, Indonésie, Nigéria, Turquie). Bien que le Bénin soit un pays
francophone de la CEDEAO, il est au sein de cette communauté l’un des pays avec
lesquels le Nigéria partage une longue histoire et une culture commune. Du sud au nord,
dans les Etats tels que Lagos, Ogoun, Kwara, Niger et Sokoto, ni la barrière des langues
ni les frontières coloniales n’ont véritablement réussi à séparer des « communautés
voisines très soudées partageant les mêmes cultures, les mêmes langues, les mêmes
relations, la même histoire, les mêmes traditions »100. Dans ce contexte, un véritable
exemple de partenariat bilatéral en matière de sécurité peut s’établir avant de s’étendre
aux autres pays. Les atouts aéronautiques nigérians permettront à l’Armée de l’Air du
Bénin, de prendre enfin son envol à condition que les diverses contraintes et facteurs de
risques soient contenus.
Paragraphe 1: Les opportunités aéronautiques, technologiques et économiques
La NAF s’est au fil des années équipée d’une variété de moyens aériens et
d’infrastructures aéronautiques en accord avec ses ambitions. Aujourd’hui, elle dispose
de plus de cent quarante (140) aéronefs divers en service dont quarante-deux (42)
hélicoptères, une trentaine d’avions de transport, une vingtaine d’avions de chasse et plus
d’une cinquantaine dédiée à la formation du personnel
101
. L’acquisition en novembre
2020 des chasseurs de type « JF-17 Thunder Fighter Jet » conçu par l’Armée de l’Air
Pakistanaise en collaboration avec la République Populaire de Chine et l’équipement de
l’école de pilotage 401 en avions pakistanais légers de type « Supermushshak », traduisent
les relations privilégiées qu’entretiennent la NAF et les pays en voie de développement
100
J. IGUE et A. ASWAJU, "The Nigeria-Benin Transborder Cooperation : Proceeding of the Bilateral
Workshop" , Administrative Staff College of Nigeria, Topo, Badagry, 1988, pp.6-12.
101
Defense Nigeria, URL :
https://mobile.twitter.com/DefenseNigeria/status/1371104692743368710, visité le 5 janvier 2021 a
17 :33 :21.
41
ou émergents. De même, l’acquisition de quelques exemplaires d’avions brésiliens de
voltige turbopropulseur de type « A-29 Super Tucano » pour la lutte anti-guérilla,
témoignent de la volonté de la République Fédérale de réorienter ses priorités en termes
de partenariat.
En outre, cette armée de l’air, « conduit depuis quelques années de façon autonome
des formations complètes dans chacune des spécialités aéronautiques au profit de ses
personnels dans six (06) écoles de formation » 102 dont :
•
Une école de pilotage et un Institut de Technologies de l’Armée de l’Air à Kaduna
pour la formation initiale de jeunes pilotes et techniciens appelés à servir l’Armée
de l’Air Nigériane ;
•
Une école à Kano103 pour le stage d’instructeur de vol et la formation avancée au
pilotage d’avions de chasse ;
•
L’école Internationale d’Aviation (IAC)104 de Illorin, chargée de la formation des
pilotes militaires de transport ;
•
Une école de pilotage sur hélicoptères de combat, « 305 Flying Training School »
à Enugu105.
Aussi, l’armée de l’air nigériane produit puis exploite-t-elle depuis quelques
années des drones militaires tels que « Gulma », « Amebo » et « Tsaigumi »106, pour la
surveillance côtière, des frontières et des bases aériennes. De même, l’expérience acquise
par le Nigéria à travers la récente mise sur pied de l’escadrille K9, dédiée au dressage des
102
Entretien avec un Officier Supérieur nigérian, le 14 avril 2021 à Cotonou.
Deuxième ville du Nigéria par sa population. Située au Nord du pays, elle est la capitale de l’Etat de
Kano.
103
L’International Aviation College est une propriété de l’Etat de Kwara à l’Ouest du Nigéria à 230 Km de
Parakou.
104
105
L’International Helicopter Flying School est situé à Enugu, la ville des collines au Sud-Est du Nigéria.
Nigerian Made Drones – Peoples Trust Africa URL www.peoplestrustafrica.com/nigerian-madedrones/#.YKePVHmg_IU consulté le 21 mai 2021 à 12:45:12.
106
42
chiens de défense, de patrouille et de détection d’explosifs pourrait-être capitalisée par le
Bénin à travers les accords de coopération.
Par ailleurs, l’élan technologique amorcé par la Defence Industries Corporation of
Nigeria (DICON), avec l’existence du centre d’études technologiques « Nigerian Air
Force Institute of Technology (AFIT)» et les structures de maintenance telles que la 16ème
Escadrille Logistique de Kainji et « CAVERTON Support Group » constituent des
solutions efficaces de proximité à saisir par l’AAB107.
En pratique, il s’agira dans le cadre de la coopération bilatérale de créer des
conditions, suivies et pilotées par un comité, favorables à la disponibilité de matériels
volants et des personnels technico-opérationnels. Le but étant d’accroître le potentiel
aérien susceptible d’appuyer les forces de surface du duo de pays dans leur lutte contre
les menaces communes. Partant de la signature d’un traité bilatéral, le comité de suivi
aura pour mission d’analyser l’état des relations bénino-nigérianes sur les plans
sécuritaire, politique et économique puis de mettre en lumière les questions et les
problèmes concrets qu’elles posent à l’échelle gouvernementale. Pour ce faire, le comité
fera régulièrement des propositions et suggestions pratiques qui s’imposent, afin
d’approfondir et d’harmoniser l’ambition des deux pays sur la base des potentialités
aéronautiques de chaque Etat. Cela passera par l’organisation régulière des rencontres et
séminaires réunissant les hauts fonctionnaires, experts et auteurs de travaux de recherches
dans les domaines d’intérêt commun.
Cette coopération bilatérale pourra ainsi évoluer pour devenir un modèle
d’intégration des forces armées d’Afrique de l’Ouest en mitigeant les risques liés aux
velléités nationalistes inavouées et à l’emprise de la France sur ses anciennes colonies.
107
Entretien avec un officier de l’AAB le 08 avril 2021 à Cotonou.
43
Paragraphe 2: Les contraintes liées aux accords militaires avec la France
(AMT) et les facteurs de risque liés aux velléités nigérianes inavouées
Les armées africaines francophones, ne sortiront du cercle vicieux de l’assistance
étrangère dans lequel ils se meuvent depuis plus d’un demi-siècle que lorsqu’elles
s’orienteront vers une coopération libre entre elles. C’est d’ailleurs pourquoi la France
encourage officiellement l’orientation de ses partenaires africains vers la coopération
Sud-Sud en apportant son aide à la création des écoles nationales à vocation régionale et
l’école de pilotage au Sénégal. Néanmoins, l’influence de cette nation sur tous les pays
francophones d’Afrique constitue une donnée importante à prendre en compte lorsqu’il
s’agit d’une coopération avec un autre pays en l’occurrence non francophone. Elle est en
effet garantie par les accords militaires de Défense108, ceux de coopération à travers
l’Assistance Militaire Technique (AMT) de la France. Ces accords de défense traitent du
fonctionnement des comités de défense et de la coopération dans le domaine des matières
premières et des produits stratégiques. Les accords spéciaux offrent la possibilité de «
faire appel à la France » (pour la défense intérieure et extérieure du pays) 109. Certains de
ces accords n’ont jamais été publiés à cause des clauses secrètes qu’elles comportent110.
Une des entraves à la liberté de choix de partenaires pour l’émergence de
l’aviation béninoise est la coopération établie avec l’ancienne puissance coloniale aux
lendemains des indépendances. En effet, les accords de coopération111 signés en 1960
entre le Bénin et la France, limitent le choix des partenaires puisqu’ils comportent un
texte principal stipulant le « devoir d’aide mutuelle des deux pays pour préparer et assurer
leur défense ». C’est pourquoi, les questions de coopération militaire, la question
108
La France est liée par un accord de défense à huit pays africains : le Cameroun, la République
centrafricaine, les Comores, la Côte d’Ivoire, Djibouti, le Gabon, le Sénégal et le Togo.
109
C. Evrard, « Retour sur la construction des relations militaires franco-africaines », Université de
Toulouse Jean Jaurès, Relations Internationales n°165, 2016, p.5.
110
Rapport du Sénat n° 639 sur la session extraordinaire de 2009-2010, Présidence du Sénat français,
2010, p.10.
111
Des accords de coopération sont conclus par la France avec le Bénin, le Burkina Faso, le Mali, le Niger,
la Guinée équatoriale ou encore le Tchad, mais ils ne constituent pas des accords de défense.
44
d’équipement des FAB et celle de son Armée de l’Air en particulier nécessitent la mise
en place d’une véritable nouvelle « aéropolitique »112. C’est à elle que reviendra la charge
de réorienter et suivre les partenariats ou à défaut, d’atténuer leurs effets négatifs sur
l’élan de développement amorcé par le pays. De la mise en place effective des mesures
d’atténuation va dépendre la réussite d’un projet de coopération militaire bilatérale entre
les armées du Bénin et du Nigéria voisins à l’image de celle franco-allemande suivie par
le Comité d’Etude des Relations Franco-Allemandes (CERFA) depuis 1954113.
En ce qui concerne particulièrement les accords d’AMT, ils décrivent en détail la
forme de collaboration avec la France, précisent avec exactitude l’appui à apporter ou
fournir à l’armée, traitent du statut des membres des forces armées françaises sur le
territoire béninois, et détaillent l’aide et les facilités mutuelles de chaque partie vis-à-vis
de l’autre en matière de défense. En séparant les accords de défense de ceux de
coopération, on remarque que tous les pays voisins du Bénin n’ont pas forcément signé
les trois types de contrat. L’objectif visé était la transmission de l’appareil militaire
français, organisation, compétences et matériel compris, tout en parant aux « dangers »
les plus immédiats grâce à la possibilité de faire appel à l’armée française114. Les accords
de coopération, de conventions d’assistance militaire technique ont permis à la France
d’assurer la défense de certains États africains, la formation et l’équipement des armées
nationales et d’intervenir le cas échéant sur le terrain. Mais en les examinant dans leur
ensemble, on constate que la France n’intervient que lorsque ses intérêts à elle et non
celles du pays africain concerné sont menacés. Les coopérants techniques français sont
aujourd’hui uniquement présents au sein des positions les plus stratégiques de
l’administration militaire béninoise (Marine Nationale, Etat-Major Général, Centres de
formation opérationnelle, etc). La France n’assiste les pays concernés que lorsqu’elle y
gagne quelque chose. Par exemple, l’AAB dont l’importance opérationnelle depuis
quelques années est moindre, n’a plus techniquement été appuyée depuis le départ en
112
Définie plus haut p.20.
D. Puhl, « coopération en matière d’armement entre la France et l’Allemagne, une entente
impossible ? » visions franco-allemande, n°31, ifri, 2020 ; p.2.
113
114
C. Evrard, loc.cit, p.6.
45
2010 du dernier coopérant Air, le Lieutenant-Colonel Patrick VALLOT. Cette
composante des Forces Armées Béninoises au regard des missions qui lui sont
dévolues115, est particulièrement mal équipée, mal armée, mal entraînée et semble plutôt
délaissée. Sans son appui, les autres armées, aussi modestement équipées par rapport à
l’ampleur des nouvelles menaces, auront de grandes difficultés à assurer leurs fonctions
régaliennes. En réalité, ces coopérants ont généralement accès aux informations sensibles
au point où ils peuvent renseigner leurs pays sur l’opérabilité des troupes d’élite locale et
s’assurer que l’aptitude de ces dernières n’excède pas le niveau fixé par leur hiérarchie.
Dès lors, la multiplication des accords avec d’autres pays constitue une condition
essentielle à la mise en œuvre d’une communauté de sécurité avec les pays voisins en
l’occurrence ceux anglophones. Toute chose qui limiterait l’ingérence française à chaque
fois que les intérêts de Paris seront menacés.
Tableau 4: Calendrier de naissance des États francophones voisins du Bénin.
Pays
Proclamation
des
Républiques
Transfert des Indépenda Signature
compétences nce
d’accords
de défense
ou
de
coopération
Signature
Adhésion
d’AMT
à la
Admission à
l’ONU
communaut
é rénovée
Dahomey
4/12/1958
1/8/1960
Niger
18/12/1958
3/8/1960
Multipartite
du
24/4/1961
Haute-Volta
11/12/1958
11/7/1960
5/8/1960
NON
24/4/1961
NON
20/9/1960
Togo
5/12/1958
Pays
sous 27/4/1960
mandat, déjà
virtuellement
indépendants
10/7/1963
26/10/1961
NON
20/9/1960
Source : SHD, 10T211, affiches récapitulatives ; CHETOM, 15H80 : Capitaine
René Massip, « Évolution de l’assistance militaire technique dans les pays d’expression
française d’Afrique Noire au sud du Sahara et à Madagascar », 1973.
Surveillance et défense de l’espace aérien, soutien aux autres armées, participation à la Défense
Opérationnelle du Territoire, assistance aux Autorités, aux services publics et aux populations.
115
46
Les accords franco-africains de défense, de coopération et d’assistance militaire
technique (AMT), signés entre le 22 juin 1960 et le 19 juin 1961 116, forment un solide
maillage qui constitue sur le terrain la plus grande entrave aux tentatives d’unions
exclusivement africaines. Ils occupent une place stratégique dans la recomposition des
liens entre la France et ses anciennes colonies africaines après les indépendances. Bien
entendu, la France cherche encore aujourd’hui à maintenir une présence militaire sur le
continent en construisant une coopération non seulement avec ses anciennes colonies
mais aussi avec les autres Etats africains dont le Nigéria. En dépit des clauses abusives
des AMT et le succès rétrospectif qu’ils représentent pour la France en termes stratégiques
et économiques, les élites politico-militaires béninoises disposent d’une marge de
manœuvre qui est loin d’être nulle pour s’affranchir de la dépendance étrangère et
consolider sa sécurité nationale. Ce faisant, les armées africaines francophones, ne
sortiront du cercle vicieux de l’assistance étrangère dans lequel elles se meuvent depuis
plus d’un demi-siècle que lorsqu’elles s’orienteront vers une coopération libre entre-elles.
C’est pourquoi, dans sa position d’armée modeste d’un millier de personnes en
coopération avec celle de dix-huit mille (18.000) personnels d’active117, l’AAB devra
prendre des mesures pour mitiger les risques d’une domination impérialiste. Cela
protégera le pays d’éventuelles influences et prétentions dominatrices, pendant que le
Nigéria fait ce qu’il peut pour s’affirmer sur la scène régionale118.
Historiquement, comme la plupart des pays voisins africains, les différends
frontaliers existent entre le Bénin et le Nigéria. Longue de 773 km, la frontière entre ces
pays débute sur le Golfe de Guinée et finit au fleuve Niger au Nord du Bénin. « L’espace
frontalier entre ces pays est polarisé par les localités de Sèmè-Kraké, de Ifangni-Igolo, de
116
Id, p.5.
117
The Military Balance 2020, p.494.
118
Allusion faite au postulat réaliste de Thucydide « les forts font ce qu’ils peuvent et les faibles subissent
ce qu’ils doivent » où la faiblesse des Méliens leur impose de céder aux prétentions d’Athènes dans La
guerre du Péloponnèse, Paris, 1964 tel que relayé par G. LAGANE, Théorie des relations internationales.
Des idées aux Etats, Ellipes Edition Marketing, 2016, p.2.
47
Nikki et de Sègbana. Située au Sud-Est, dans le département de l’Ouémé et à la frontière
avec la conurbation de Cotonou, la localité de Sèmè-Kraké concentre d’importantes
migrations »119. Quant à la zone frontalière allant de Nikki à Ségbana, elle abrite
d’intenses activités commerciales et d’échanges culturels entre les peuples vivant de part
et d’autre de la frontière. Si officiellement les conflits frontaliers entre ces deux pays
frères ont été résolus en 2009120, des incidents perdurent.
La récurrente fermeture unilatérale des frontières bénino-nigérianes en dépit des
accords de libre circulation des personnes et des biens dans l’espace CEDEAO, n’est pas
de nature à instaurer une paix durable entre ces deux nations. Il en est de même des
velléités inavouées et ensevelies au plus profond des Etats comme les propos réfractaires
à l’idée d’un rapprochement entre le Bénin et le Nigéria, parfois tenus par les plus hautes
autorités des deux Pays. En effet, le président nigérian Muhamadou Buhari, en réaction
aux critiques sur sa décision de construire aux frais du Nigéria (1.9 milliard $), un chemin
de fer reliant la ville de Kano à celle de Maradi au Niger, déclare : « le Niger comme vous
le savez, a aussi découvert le pétrole et nous ne souhaitons pas les voir le faire passer par
la République du Bénin, nous voulons qu’ils passent par le Nigéria au lieu du Bénin »121.
Aussi, les « efforts insuffisants » du Bénin contre l’ampleur de la contrebande
camouflent-ils un certain intérêt pour les populations béninoises, enclins au commerce
informel, au détriment de la République Fédérale du Nigéria. C’est donc dire qu’il n’est
pas exclu qu’un incident diplomatique majeur puisse hypothéquer les cordiales relations
entre le Bénin et le Nigéria. Pour Robert Keohane et Robert Axelrod, ce sont « les
perceptions qui définissent les intérêts et pour comprendre le degré de réciprocité des
intérêts il est indispensable de concevoir le processus par lequel les intérêts sont perçus
A. AGBON, M. TCHIBOZO et O. THOMAS, Cartographie du risque d’insécurité systémique dans les
communes frontalières du Bénin, p.454.
119
120
Revue Carto n°20, Annexion nigériane au Bénin, 2013, p.7.
121
Matin Libre, URL matinlibre.com, consulté le 07 aout 2021 à 10 :21 :42.
48
et les préférences sont déterminées »122. Par ailleurs, Sanders cherchant à déterminer « les
limites de l’approche de la théorie des relations internationales fondée sur la théorie des
jeux » dans les débats entre néoréalistes et néolibéralistes, a essayé de formuler le contenu
des intérêts de l’État-nation sous l’aspect de leur perception chez les dirigeants qui le
représentent. Il distingue pour ce faire deux types d’intérêts inhérents à un État national :
économique et écologique, qui comprennent le bien-être économique et environnemental
de la population à long terme; politique et de sécurité, qui visent à maximiser la capacité
de l’État à répondre rapidement et efficacement aux menaces et défis externes123.
En conséquence, le respect de la souveraineté et des intérêts étatiques doit être de
mise pour une coopération fructueuse et durable entre ces deux armées de l’Air.
En dépit des velléités économiques inavouées entre le Nigéria et le Bénin, et de
l’insécurité à laquelle fait face le pays, la NAF regorge d’une gamme variée
d’opportunités aéronautiques et industrielles à capitaliser par l’AAB. Ses personnels
hautement qualifiés en aéronautique conduisent avec aisance et de façon autonome la
formation des aviateurs et la maintenance du matériel volant avec l’appui des structures
aéronautiques civiles du pays. La matrice SWOT de la NAF dans sa coopération avec
l’AAB peut donc se présenter comme suit :
122
Axelrod R. Keohane R.O. Achieving cooperation under anarchy: strategies and institutions. In: Baldwin
D. (ed.). Neo-realism and Neo-liberalism: The Contemporary Debate. New-York: Columbia University
Press, 1993, p.85-115.
123
Sanders David. Relaţiile Internaţionale: neorealism şi neoliberalism. In: Manualul de ştiinţă politică /
ed. Goodin Robert. Klingemann Hans-Dieter. Iaşi: Polirom, 2005, p.375-389.
49
Tableau 5: Matrice SWOT de la NAF dans sa coopération avec l’AAB.
FORCES
FAIBLESSES
Personnels hautement qualifiés
Insécurité du pays
Diversité et qualité de matériel volant
Concurrence inavouée entre les deux
nations
Existence d’une Industrie de Défense
Marché aéronautique à proximité
Barrière linguistique
Formation autonome du personnel
Proximité des deux pays
Renforcement
des
capacités
de
maintenance grâce aux partenariats civils
OPPORTUNITES
RISQUES
Exploitation de l’industrie de défense
Faible rémunération financière
Extension de son influence au sein de la
CEDEAO
Violation du secret défense
Sabotage étranger
Marché de défense
Meilleur contrôle des frontières Ouest et
maritimes
Immersion linguistique
Conclusion partielle de la première partie
En définitive, la proximité et les atouts opérationnels dont regorgent les armées
de l’air nigériane et béninoise militent en faveur d’un renforcement de la coopération
bilatérale entre elles.
L’Armée de l’Air du Bénin (AAB), malgré les diverses mutations qu’elle a
connues ainsi que le dévouement et le professionnalisme de ses hommes, peine encore
aujourd’hui à relever son niveau opérationnel. Si pendant la guerre froide elle avait
disposé gracieusement d’un strict minimum d’aéronefs militaires en bon état, la période
50
suivante a été marquée par une baisse drastique d’activités aériennes qui ont entravé son
opérabilité. L’insuffisance de ressources dédiées à la formation, à l’entretien et à
l’opérationnalisation des personnels, ont progressivement condamné les aviateurs à
l’utilisation de matériels vétustes et accentué leur dépendance technique vis à vis des
partenaires étrangers. Aujourd’hui, ce pays francophone, encore attaché à l’Assistance
Militaire Techniques française, manque de stratégies pour capitaliser les multiples atouts
aéronautiques et technologiques de son vaste et dynamique voisin avec qui il partage les
mêmes menaces.
L’Armée de l’Air du Nigéria, la Nigerian Air Force (NAF) a quant à elle, depuis
sa création subi une révolution opérationnelle qui lui a permis d’être aujourd’hui au centre
des opérations nationales d’envergure et de devenir une référence sous régionale. Pourtant
créée en 1964, elle ne disposait à ses débuts que de moyens modestes et dépendait
essentiellement de l’assistance technique allemande et britannique. Devenue une
composante indépendante des forces armées fédérales, elle est dotée en capacités de
production d’aéronefs, de maintenance d’aéronefs et d’une opérabilité avérée. Ses
nombreux centres autonomes de formations opérationnelles et technologiques ajoutés à
l’étendue et la diversité de sa flotte d’aéronefs militaires témoignent d’un niveau de
maturité inégalé dans la sous-région ouest africaine. Toutefois, son efficacité limitée dans
la conduite des opérations contre les groupes djihadistes, remettent en cause le patriotisme
et le professionnalisme de ses aviateurs.
51
PARTIE II:
LA MULTIPLICITE DES
ENJEUX ET LES PERSPECTIVES
D’UNE MEILLEURE COOPERATION
POUR LE BENIN
52
CHAPITRE 3:
LES ENJEUX MULTIPOLAIRES
La mise en œuvre de la puissance aérienne en Afrique de l’ouest constitue un enjeu
majeur en raison des quatre caractéristiques (hauteur, rapidité, allonge124 et permanence)
qu’offre l’arme aérienne aux forces de surface dans leurs luttes contre les nouvelles
menaces. En outre, la difficulté de projection des troupes béninoises lors des opérations
nationales et celles de maintien de paix est une question à laquelle une meilleure politique
de coopération bilatérale entre la NAF et l’AAB peut trouver une réponse adéquate.
Section 1: De la nécessité d’appuyer les autres forces de défense
Au regard des évolutions technologiques qu’a connu l’arme aérienne au Nigéria
et l’introduction des drones militaires capables d’assurer la persistance sur zone, les
armées de l’air du Bénin et du Nigéria sont plus disposées à coopérer efficacement avec
les autres composantes des forces armées, lors des manœuvres terrestres et navales.
Aussi, la coopération bilatérale entre ces deux armées de l’air devra-t-elle veiller à travers
des pôles aéronautiques communs, à la formation des aviateurs et à faire des efforts pour
la maintenance et l’exploitation de vecteurs aériens communs de sorte à garantir une
interopérabilité entre partenaires au profit des composantes terrestre et maritime.
Paragraphe 1: La marine dans la lutte contre la piraterie
Lutter efficacement contre la piraterie maritime, requiert l’intégration et la
coordination des tactiques et modes d’action aéromobiles à ceux des composantes de
surface. Cette donnée constitue un paramètre essentiel à prendre en compte pour juguler
ce fléau qui menace l’économie régionale. Ainsi, les efforts quotidiens consentis par les
marines nationales béninoise et nigériane dans la lutte contre la piraterie, pouvaient
d’avantage être renforcés par des actions conjointes des Armées de l’Air si la coopération
opérationnelle entre les armées de l’air avait existé comme celle maritime. En réalité, la
124
Capacité d’intervention à longue portée.
53
fréquence de ces actes de piraterie maritime dans le Golfe de Guinée125 et l’importance
stratégique de celui-ci a conduit à la naissance d’une certaine coopération entre les
marines voisines. L’initiative de la création de la Zone maritime «E»126, est la
manifestation la plus éloquente des louables efforts de la sous-région dans le domaine
maritime. Le Docteur Charles Ukeje et le Professeur Wullson Mvomo Ela dans
“Approche africaine de la sécurité maritime : cas du Golfe de Guinée“, affirment qu’il
s’agit d’ « un espace maritime constitué d'environ seize (16) pays qui se partagent environ
600 kilomètres de littoral ininterrompu »127. Mais, dans son acception la plus large, le
Golfe de Guinée est constitué du rentrant maritime qui s’étend de la Guinée à l’Angola.
Cette conception prend en considération un espace constitué de seize (16) Etats riverains
de l’Atlantique et couvrant un littoral de plus de 7.000 km dont le plus long est l’Angola
avec 1.600 km et le plus court la RDC avec 37km128.
En dépit de la réaction internationale pour faire face à cette menace, le phénomène
de la piraterie s’est répandu dans le Golfe de Guinée ces dernières années. Plusieurs
groupes rebelles y ont mené, à partir de la mer, des attaques contre des embarcations et
des installations portuaires (navires aux larges des côtes maritimes béninoises), contre des
forces militaires (exemple de la Péninsule de Bakassi), ou encore contre la résidence
présidentielle à Bata (Guinée Equatoriale). En effet, le crime organisé qui se rapporte aux
actes de piraterie n’a eu cesse de s’agrandir dans cette zone géographique en faisant d’elle,
le nouvel épicentre de la piraterie maritime en Afrique. Parmi ces actes criminels, figure
la piraterie maritime qui se manifeste par des actes de violence, de kidnapping, de vol ou
de toute déprédation perpétrés en dehors des zones maritimes de souveraineté étatique.
Elle fait partie des dix régions identifiées par l’Organisation Maritime Internationale
125
La superficie du Golfe varie de 475.000 km2 à 2.350.000 km2 selon les auteurs.
126
Zone maritime regroupant le Benin, le Niger, le Nigéria et le Togo.
127
Dr C. UKEJE & Prof. W. M. ELA, « Approche africaine de la sécurité maritime : cas du Golfe de Guinée »,
séries FES sur la Paix et la Sécurité en Afrique Friedrich-Ebert-Stiftung, n°11, Abuja, Nigéria, 2013, p. 9.
128
URL http://www.memoireonline.com/09/10/3846/m_Initiatives-diplomatiques-et-occupation-de-
lespace africain-le-cas-du-golfe-de-guinee-2001-2003.html consulté le 28 septembre 2021 à 01 : 43.
54
(OMI) comme les plus dangereuses du monde où ont lieu ces actes criminels. Classée par
le Bureau Maritime International (BMI) comme la seconde région la plus dangereuse
après le Golfe d’Aden, le Golfe de Guinée est une région vaste, diversifiée et très
importante.
C’est pourquoi, l’initiative du gouvernement nigérian qui a lancé le 10 juin 2021
à Lagos l’opération « Deep Blue », devrait apporter une certaine quiétude dans cette zone
maritime et susciter une coopération opérationnelle plus accrue avec les pays voisins de
cette zone. Composée de plus de six cent (600) personnels équipés de deux (02) avions,
trois (03) hélicoptères129 deux (02) navires et dix-sept (17) bateaux patrouilleurs, seize
(16) véhicules blindés et quatre (04) drones, cette opération est destinée à la lutte contre
la piraterie maritime au Nigéria et Golfe de Guinée 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 130.
S’il est vrai que cette initiative unilatérale ne cadre pas avec les ambitions
intégrationnistes qui préconisent une solution collégiale, il n’en demeure pas moins
qu’elle vient à point nommé dans cette région en proie à la piraterie maritime. En réalité,
le Nigéria et le Bénin, bien qu’ils aient plusieurs fois exploité des types d’aéronefs
identiques, avaient jusque-là manqué d’entreprendre et coordonner leurs actions au profit
des Marines Nationales en lutte contre cette menace galopante.
La mise en place d’un Centre Multinational d’Appui Aérien aux Opérations
Maritimes (CMAAOM) doté d’aéronefs (avions, hélicoptères et de drones militaires)
pour des missions ISR permettrait de soutenir les efforts des marines nationales dans la
lutte contre la piraterie maritime sur le littoral bénino-nigérian long de 978 km dont 125
km au Bénin et 853 km au Nigéria131. Ces aéronefs devront être équipés de matériel de
transmission compatibles à ceux installés sur les patrouilleurs maritimes. Aussi le choix
129
Des avions Cessna 525B CitationJet CJ3 et des hélicoptères AW-109 LUH ont été choisis et livrés au
Nigéria dans le cadre de ce projet.
Nigeria’s Deep Blue Project, URL https:// www.harbourmaster.org/News/nigerias-deep-blue-project
visité le 25 juin 2021 à 00 :32 :41.
130
131
A. BASSOU “Le Golfe de Guinée, zone de contrastes : Richesses et vulnérabilités“, 2016, p.9 .
55
du matériel commun et la conduite d’entraînements conjoints devront-ils faciliter ces
opérations d’envergure. Ainsi, le CMAAOM à l’instar du Centre Multinational de
Coordination Maritime (CMCM) viendrait renforcer la sécurité de la zone maritime « E »
en général et du port de Cotonou en particulier. Ce port qui constitue le poumon de
l’économie béninoise et celui qui dessert essentiellement le Nigéria, serait ainsi protégé
des affres de ce phénomène.
L’appui aux opérations maritimes ne constitue cependant pas la seule activité à
laquelle devra se pencher la coopération entre la NAF et l’AAB.
Paragraphe 2: L’armée de terre dans le combat contre le terro-banditisme et
l’extrémisme violent
Dans la conduite des opérations militaires, la coordination entre les opérations
terrestres et aériennes constitue l’un des plus grands défis à relever par les forces armées
africaines pour leur efficacité au combat. En effet, dans nombre de pays, les opérations
aériennes se sont illustrées comme gage de réussite des opérations terrestres appelées à
animer les domaines d’actions de surface. Puisque la dimension aérienne accroît les
performances de l’armée de terre, son efficacité demeure essentielle pour la justesse dans
l’action collective interarmées. C’est pourquoi, l’intégration des tactiques et modes
d’action aéromobiles132 à ceux de l’armée de terre du Bénin dans la lutte contre le terrobanditisme permettra au pays d’être plus aguerri contre ce fléau. En réalité, à travers son
action, l’armée de l’air peut satisfaire aux besoins en termes de mobilité en cas de crise
majeure. Les possibilités de projection rapide des troupes en zones difficiles d’accès ainsi
que l’observation aérienne et l’appui feux rapproché aux troupes qu’elle pourrait procurer
dans la lutte contre ces groupes parait un grand atout pour les FAB. Sans l’action de
l’Armée de l’Air, les terrains accidentés des montagnes et des forêts du Nord du pays déjà
en proie aux velléités terroristes, rendraient difficiles les éventuelles offensives
antiguérilla.
J.C Allard, « L’aérocombat, futur de la manœuvre aéroterrestre, Comité d’études de Défense
Nationale », Revue Défense Nationale 2015/2 N° 777, p. 93.
132
56
Le choix non clairvoyant du Nigéria en 2014 de placer l’armée de terre au centre
des opérations de lutte contre Boko Haram au détriment de la NAF a été lourd de
conséquences. Il a en effet privé en son temps la force engagée de groupements
aéromobiles très manouvrants, capables de traquer en souplesse les insurgés de la secte
par la troisième dimension. L’existence d’unités aériennes tactiques auraient entravé
fortement la liberté d’action des terroristes du fait de leur capacité de projeter avec célérité
les troupes dans les localités attaquées tout en s’affranchissant du risque d’embuscades
sur les routes. A cette époque, la secte Boko Haram ne disposait que d’un armement antiaérien modeste constitué de mitrailleuses montées sur des pickups et quelques lanceroquettes antichars RPG-7. Aujourd’hui avec la prédominance des opérations aériennes,
la menace est mieux contenue bien que les terroristes disposent d’un arsenal militaire plus
développé qui a accru leur capacité de nuisance et leur rayon d’action. La multiplication
des attaques terroristes dans des pays limitrophes dont les armées sont pour la plupart
démunies face à Boko Haram impose une réorganisation et une mise en commun des
moyens face à la secte islamiste.
Malheureusement, les armées de l’air béninoise et nigériane n’ont encore jamais
réussi à conduire une manœuvre multinationale de surveillance des frontières,
régulièrement traversées par des groupes terroristes. Pourtant, au regard de l’évolution de
la situation sécuritaire nationale, une meilleure stratégie s’impose pour le contrôle des
frontières béninoises en l’occurrence celles du nord du pays. D’une part parce que tous
les Etats voisins du Bénin excepté le Togo, sont quotidiennement engagés dans le combat
contre les groupes Djihadistes et d’autre part, parce que ces groupes ont déjà opéré sur le
territoire national en mai 2019 en y enlevant deux touristes français et leur guide dans le
parc de la Pendjari avec la probable existence d’un Katiba133 terroriste dans la région de
Kérou. Aussi, la présence de Boko Haram dans l’Etat du Niger qui est frontalier du Bénin
est attestée depuis le 25 avril 2021 par l’implantation de leur drapeau134.
133
Unité ou camp d’une centaine de combattants.
134
URL https://www.aa.com.tr/en/africa/boko-haram-seizes , consulté le 12 juin 2021 à 16 :37 :33.
57
De même, certaines missions de l’armée de terre comme l’escorte de convoi et le
contrôle de zone peuvent également se faire de concert avec l’armée de l’air en soutien
aérien. Ces missions typiques aux aéronefs de l’Aviation Légère d’Observation (ALO)
seront d’une grande efficacité pour les troupes béninoises engagées depuis quelques
années dans l’opération « BOUINYINDOU135 » au nord du Bénin. Une unité d’aviation
légère d’observation basée au DAP de Kandi pourrait ainsi être exclusivement dédiée à
soutenir cette opération. Cela nécessitera outre l’acquisition du matériel volant, la
construction d’un hangar, la construction de bâtiments et l’aménagement de l’aérodrome
de Kandi afin de le rendre opérationnel en y affectant des personnels et moyens de l’AAB.
L’acquisition rapide de ces moyens doit inclure des moyens d’appui feu et d’auto-défense
au regard de l’avancée des groupes djihadistes dans la zone.
L’aviation de transport léger et celle d’observation, bien adaptées aux menaces
non conventionnelles pesant sur la sécurité du pays seront priorisées au détriment
d’avions d’attaque coûteux qui risquent d’épuiser les ressources limitées du budget
national de défense. En réalité, la guerre contre le terro-banditisme nécessite très peu
l’aviation de chasse. En revanche, le pays pourrait grâce à la coopération nigériane mettre
en place une QRF136 aérienne d’appui aux opérations terrestres dotée d’un chasseur
nigérian A-29 Super Tucano ou de JF-17 Thunder, éclairé par des avions de
reconnaissance Cessna CJ3, des drônes Gulma ou ADS Aerostar et plusieurs hélicoptères
d’attaque de type Mi-17, Agusta AW-109 LUH ou A-101 qui sont réputés solides et
rustiques. En conséquence, le Bénin devra envisager dans un futur proche, l’acquisition
de chacun de ces vecteurs aériens susceptibles d’être exploités tant dans les opérations
nationales que régionales.
Mise en place suite à l’enlèvement sur le Parc W de deux touristes français, cette opération se
sécurisation qui signifie « Paix » en langue locale Baatonu est conduite par un Bataillon constitué de cinq
(05) unités subordonnées positionnées sur les parcs de la Pendjari et du W, à Médécali, à Nikki et à
Ségbana.
135
136
La Quick Response Force est une unité d’intervention rapide.
58
Section 2: Les enjeux de la participation aux opérations militaires régionales
Les dirigeants des Etats africains subsahariens font de la sécurité collective une
condition essentielle à la bonne gouvernance. Ainsi chaque année, d’innombrables
actions significatives sont conduites par l’organisation continentale et les organisations
régionales africaines pour la mise en œuvre d’opérations militaires interafricaines de
maintien de la paix. Le mécanisme employé reste cependant limité par plusieurs
problèmes et les défis comme la capacité de projection des troupes et d’appui feux sont à
relever pour son efficacité.
Paragraphe 1: Les forces en attente et l’optimisation des budgets de défense de
plus en plus croissants
L’Union africaine (UA) à travers son Architecture de Paix et de Sécurité (APS)
manque cruellement de moyens aériens stratégiques pour opérationnaliser la Force
Africaine en Attente (FAA)137. C’est pourquoi elle s’appuie sur une poignée d’États
membres, en particulier l’Afrique du Sud et le Nigéria puis des partenaires internationaux
pour combler ce vide. Les besoins en capacités de transport aérien des FAA comprennent
à la fois les moyens aériens pouvant acheminer des troupes et du matériel vers les zones
d’opération et des moyens d’appui feu rapproché tels que les « Super Tucano » et les
hélicoptères de combat. Mais les difficultés de l’APS de l’UA ne se limitent pas au
manque de moyens aériens. L’incohérence et l’inefficacité des actions régionales ainsi
que l’influence des forces étrangères imposent des actions de coopérations bilatérales et
multilatérales à coordonner par les communautés régionales.
Aujourd’hui encore, le continent africain est marqué par la multiplicité des blocs
d’intégration. « La plupart des États africains sont membres de plusieurs communautés
d’intégration qui se chevauchent »138. Si la coexistence au sein des communautés a des
137
La FAA est le futur bras armé de l'Union africaine. Elle doit être composée de cinq brigades,
correspondant aux cinq blocs politico-économiques du continent : Afrique du Nord, de l'Ouest, centrale,
australe et de l'Est.
138
C. T. DIEYE, « L'Afrique et le chevauchement des accords régionaux, D'un régionalisme à l'autre :
intégration ou interconnexion? », Interventions économiques, n°55, 2016.
59
cohérences juridiques, des visions politiques et des objectifs économiques différents sont
le plus souvent source d’incohérence et de difficultés dans la mise en œuvre de l’agenda
d’intégration au sein des régions. C’est pourquoi, l’UA s’était proposé en 2015, de créer
un dispositif transitoire en attendant l’opérationnalisation de la capacité de déploiement
rapide de la FAA. Dénommée Capacité Africaine de Réaction Immédiate aux Crises
(CARIC), elle est conçue pour répondre aux besoins de l’UA et exclut du processus de
prise de décision politique, les CERs dont l’organisation continentale dépend pour le
déploiement de la FAA139. Avec la CARIC, c’est donc un nouvel indicateur de rivalités
entre les CERs et l’UA qui a été créé. Ainsi en 2015, l’ECOBRIG140 ayant été écartée et
la CARIC ne donnant lieu à aucune application concrète, les Etats membres du G5 Sahel
(Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad) ont décidé avec l’appui de la France de
lancer leur force conjointe141. Avec désormais la Mauritanie et le Tchad aux côtés de pays
membres de la CEDEAO, un autre acteur vient encore d’apparaître dans cette rivalité
entre l’UA et les organisations concurrentes exacerbées par l’influence de la France en
reconquête d’une zone d’influence presque perdue.
En réalité, les Etats africains sont de moins en moins sujets à l’influence extérieure
dans leur volonté de mutualiser leurs efforts, afin d’établir une communauté de sécurité.
Grâce aux accords bilatéraux entre Etats membres d’une même CER, les mécanismes
continentaux de gestion de crise pourront se renforcer pour annihiler les menaces exercées
par des forces extérieures. De l’efficacité dans la mise en œuvre de ces accords va
dépendre l’engagement de chacun des Etats à respecter les termes du partenariat qu’il soit
bilatéral, multilatéral ou régional. Il s’en suit que l’engagement des Etats sera respecté
dans la durée à condition que celui-ci soit bénéfique à chacune des parties mais affaibli
ou interrompu dès que l’un estimera son gain inférieur à ceux des autres parties. En effet,
l’une des caractéristiques des relations internationales est que les Etats sont préoccupés
A. GNANGUENON, L’Union Africaine et les Communautés économiques régionales Une coopération à
géométrie variable, FRIEDRICH-EBERT-STIFTUNG, 2019, p.4.
139
140
Brigade de la FAA pour CER d'Afrique de l'Ouest.
141
Ibidem.
60
par des gains relatifs142. Ainsi, maintenir ou faire évoluer la coopération sécuritaire entre
le Bénin et le Nigéria, exige de la part des deux parties une forte communauté d’intérêts,
l’acceptation des règles de gouvernance, un degré de subordination et l’engagement de
chacun à appliquer les clauses de solidarité et de sécurité communes. Les questions du
développement et d’indépendance des armées africaines sont aujourd’hui si importantes
qu’il faille rompre avec les situations d’assistance permanente des anciens colonisateurs.
C’est en tout cas, le pas à franchir par le Bénin, géographiquement, historiquement et
culturellement proche du Nigéria, pour embarquer dans le wagon du développement
industriel amorcé par ce dernier. Si sa situation financière lui impose l’évolution vers une
communauté de sécurité avec le Nigéria, le Bénin dans sa volonté de juguler les dangers
inhérents au terro-banditisme galopant, doit forcer le respect en assumant sa souveraineté
militaire. C’est aussi au travers d’un partenariat durable que la force et la violence
éventuelle entre et sur ces deux nations seront évitées au profit d’une coopération efficace
en matière de sécurité. En effet, l’unité étatique est crainte lorsque le duo l’est, et respecter
la communauté, c’est respecter les unités. Mais la vie au sein des communautés de
sécurité nécessite le difficile arrimage des budgets de défense de chacun des Etats aux
ambitions communautaires communes.
En réalité, l’argent, qui est le nerf économique de la guerre, reste également celui
de la capacité de financement des armées. Les dépenses militaires totales de l’Afrique qui
étaient de 25 milliards de dollars en 2012 sont passées à 44,9 milliards en 2013. En
Afrique subsaharienne où le Nigéria est le plus gros contributeur, elles étaient de l’ordre
de 21,6 milliards de dollars en 2017143 et « devraient se situer à plus de 60 milliards d’ici
dix (10) ans »144. C’est pourquoi, les solutions novatrices à privilégier sont celles
soutenues dans le long terme par des communautés pluralistes de sécurité. L’objectif étant
Les gains absolus sont des avantages nets que gagne un État lors d’une négociation. Les gains relatifs
impliquant que sans avoir obtenu d’avantages nets, un État a amélioré sa position par rapport aux autres,
en raison des concessions ou pertes acceptées par ces derniers.
142
143
Institut International de Recherche sur la Paix, « Rapport sur les dépenses militaires des pays de
l’Afrique Subsaharienne », 2018.
144
P. HUGON et N. E. ANGO, Les armées nationales africaines depuis les indépendances, Essai de
périodisation et de comparaison, Avril 2018.
61
pour les Etats voisins de mutualiser leurs moyens pour vaincre le terro-banditisme à
travers un processus sécuritaire bilatéral inclusif et non contrôlé par les puissances
extérieures. Elles exigent des décideurs de permanents arbitrages pour un arrimage des
efforts individuels aux ambitions sous régionales. Au Bénin par exemple, les dépenses
militaires en 2019, 2020 et 2021 représentent respectivement : 3.16, 2.69 et 3.25% du
budget national. Les dépenses au profit de l’Armée de l’Air ont quant à elles représenté
respectivement 6.87%, 8.28% et 6.36% de ces dépenses militaires annuelles145. Alors que
l’indice de paix est en pleine détérioration dans le pays146, le budget de défense demeure
restreint et l’équipement militaire inadéquat aux nouvelles menaces sous régionales. Ce
pays a vécu la pire détérioration de l’indice de paix de tous les pays du monde en 2020.
Ce qui lui valut une chute de trente-quatre (34) places sur son classement par rapport à
l’indice mondial de paix147. Avec l’avènement du terrorisme, les dépenses militaires
doivent avoir la primauté du financement publique comme cela est déjà le cas au Niger.
Initialement contraint de consacrer 10% de son budget aux dépenses militaires au
détriment des dépenses sociales en 2015
148
, le Niger est passé à 20% en 2020 avec
l’accentuation de la lutte contre le djihadisme. Cela s’explique par le fait que les Forces
de Défense et de Sécurité (FDS) luttent à la fois contre le terrorisme et les groupes armés
qui vivent de trafics et de prélèvements sur les populations. Cette volonté nigérienne d’en
découdre résolument avec les groupes terroristes crée malheureusement une spirale entre
déstructuration du tissu économique, hausse des déplacés et réfugiés, des tensions et des
possibilités de recrutement de jeunes désœuvrés149. Au Togo, c’est 25 % du budget
national qui est généralement alloués aux forces armées soit la plus grosse enveloppe
Entretien à Cotonou avec un responsable financier de la Direction de l’Administration et des Finances
du Ministère de la Défense Nationale, le 24 mai 2021.
145
146
Global Peace Index Rankings, Institute for Economics & Peace , 2020, p.19.
147
Idem .
148
Serge Michailof, « Africanistan : L'Afrique en crise va-t-elle se retrouver dans nos banlieues ? » Fayard,
2015, De Boeck Supérieur, Afrique contemporaine, 2015/4 n° 256, pages 164 à 166.
149
P. HUGON, Les armées nationales africaines depuis les indépendances, Essai de périodisation et de
comparaison, Avril 2018.
62
budgétaire du pays150. En ce qui concerne le Nigéria, le budget opérationnel est
décentralisé et l’armée de Terre, la Marine et l’armée de l’Air disposent chacune, pour
les dépenses renouvelables, du pouvoir d’administrer leurs propres contrats151. Ainsi la
sécurité apparaît primordiale pour certains alors qu’elle l’est moins pour d’autres. Cette
disparité des ressources nationales dédiées à la défense n’est pas de nature à faciliter la
coopération intra-africaine.
Outre les opérations militaires régionales, les acteurs africains sont de plus en plus
incités à prendre leurs responsabilités à travers l’envoi des troupes aux opérations de paix
se déroulant sur le continent.
Paragraphe 2: La participation aux opérations onusiennes de maintien de paix
Depuis les années 1990, les opérations de maintien de la paix constituent une des
activités essentielles du Système des Nations Unies (SNU) au service de la paix et de la
sécurité internationale. Très prisées sur le continent, plusieurs raisons expliquent
l’engouement des armées africaines à participer à ces opérations internationales. Outre
l’impact de l’engagement des contingents dans ces opérations sur les politiques
extérieures et intérieures des États, les armées africaines y voient une opportunité de
renouveler leur matériel avec l’accès à de nouvelles ressources financières et la
professionnalisation tant recherchée de leurs armées.
Toutefois, le déploiement de contingents dans ces opérations de paix requiert de la
logistique avec du matériel certifié aux normes onusiennes. Le coût lié à l’usure de ces
matériels étant entièrement pris en charge par les Nations Unies à travers un mécanisme
de compensation efficace, les pays africains contributeurs exploitent cette opportunité
pour renouveler leur matériel. En effet les ressources tant convoitées générées par ces
opérations proviennent des remboursements des matériels et équipements militaires ainsi
Centre d’Etudes Stratégiques de l’Afrique, rapport d'analyse n° 6 : pour la professionnalisation des
forces armées en Afrique.
150
151
E. Ouédraogo, « Pour la professionnalisation des Forces Armées en Afrique », Papier de recherche du
Centre d’études stratégiques de l’Afrique N°6, p.32, 2014
63
que des compensations versées au pays pour les troupes engagées. En ce qui concerne
particulièrement les matériels non référencés dans le SUR152 comme les aéronefs, les
hélicoptères, les drones, les moyens de détection radars, etc, ils font l’objet d’un
mémorandum d’accord entre le pays contributeur et l’ONU à travers la Division du
Soutien aux Capacités en Uniforme qui elle-même relève du Département de l’Appui
Opérationnel (DAO)153. C’est ainsi que les pays africains conscients des enjeux liés aux
Opérations de Maintien de Paix, ont pu renouveler leurs équipements et même en ont
acquis d’autres à l’état neuf154.
Malheureusement, de la vingtaine de missions à laquelle les FAB ont pris part
jusqu’en 2020, aucun matériel volant de l’AAB n’a pu être engagé. Pourtant à travers une
coopération bien établie avec la NAF, le Bénin pourrait former ses personnels et garantir
la disponibilité du matériel volant de sorte à mieux profiter de la rente onusienne de la
paix155 en mettant ceux-ci à la disposition de l’ONU. Ainsi non seulement les aéronefs
mis à disposition seront entretenus, mais aussi le personnel concerné sera en pleine
activité et les pays bénéficieront d’un remboursement pour la maintenance et l’usure du
matériel. En outre, les membres d’équipage reçoivent des primes pour leurs capacités
habilitantes et le pays bénéficiera d’une reconnaissance internationale en tant que pays
152
La Statement of Unit Requirements est la Déclaration de Caractéristiques de l’Unité (DCU). Ce
document détaille la composition de l’unité, sa structure et ses effectifs, la liste des matériels exiges, les
conditions du soutien logistique sur le terrain ainsi que les taches qui seront dévolues à l’unité au sein
de la Mission.
153
Général Bruno Mignot, Stratégies africaines de sécurité être acteur des opérations de paix des nations
unies, Guide pratique des pays contributeurs, l’Harmattan, 2019, p.117.
154
Des entreprises comme le groupe français OMP Solutions ou encore Sovereign Global se sont
spécialisées dans l’optimisation des achats effectués pour les OMP.
155
Les sociologues-anthropologues qui se sont intéressés aux projets de développement en Afrique,
notamment, ont produit des analyses microsociologiques fines des interactions entre acteurs impliqués
dans la gestion des projets et des ressources énormes qui sont souvent en jeu. Cf. les travaux du réseau
APAD, Olivier de Sardan, Chauveau, Bierschenk, Blundo, Jacob, Tidjani Alou, etc.
64
fournisseur majeur de paix. Cela exige cependant que les contingents soient formés selon
les règles et standards définis par l’ONU156.
En effet, le déploiement de contingents aux d’opérations de paix, nécessite une
formation spécifique. C’est pourquoi les troupes en attente de déploiement sont formées
dans les centres nationaux et régionaux pour l’acquisition des compétences requises.
Depuis plus d’une décennie, les soldats de la paix africains sont, mieux préparés aux
nouvelles missions d’interposition et de maintien de la paix qu’ils accomplissent avec
brio. Plusieurs pays se sont ainsi dotés de centres pour profiter du marché continental de
la formation au maintien de la paix. Ces formations sont financées par la coopération
internationale à travers les programmes militaires d’équipement, de formation et
d’entraînement puis conduites en particulier sous l’égide de la France et des États-Unis.
C’est ainsi qu’ont été créés le Kofi Annan International Peacekeeping Training Center
(KAIPTC) au Ghana, l’Ethiopian International Peacekeeping Training Center (EIPKTC)
en Éthiopie, l’International Peace Support Training Centre au Kenya, le Centre de
Formation aux Opérations de Maintien de la Paix à Cana (CFOMP-C) au Bénin, ainsi que
plusieurs centres au Nigeria.
L’AAB pourra donc à travers les missions onusiennes, conserver l’opérabilité de
ses aviateurs et la disponibilité du matériel volant susceptibles d’être exploités en cas de
crise nationale majeure. Pour ce faire, cette armée devra veiller à la formation technique
et opérationnelle de ses hommes grâce à une coopération efficace.
156
M. Luntumbue, Contribuer à la génération de force des OMP de demain ? Fractures capacitaires et
défis des pays contributeurs, publication n°1 de l’Observatoire Boutros-Ghali du maintien de la paix,
Octobre 2017, p.3.
65
CHAPITRE 4: LES PERSPECTIVES DE COOPÉRATION EFFICACE
Section 1:
Le pôle formation et les possibilités de création des centres
opérationnels de formation du personnel
La formation du personnel est le moyen par excellence de transmission du savoir
et savoir-faire indispensables pour façonner de véritables militaires professionnels. En
tant que démultiplicateur de performance, elle reste un atout essentiel à la réussite des
missions militaires qui, à l’évidence, sont de plus en plus dans une dynamique d’évolution
rapide au gré des mutations qui affectent le monde d’aujourd’hui. C’est aussi à travers
elle que sont développés une culture militaire commune et un socle de compétences
communs à l'ensemble des unités de l'environnement opérationnel. C’est pourquoi, la
formation des personnels navigant et techniciens aéronautiques doit être au cœur de la
coopération entre les deux armées de l’Air béninoise et nigériane. Elle permettra de
disposer de véritables aviateurs béninois capables de conduire efficacement des
manœuvres multinationales conjointes. Pour ce faire, elle devra s’axer sur les domaines
que sont la formation initiale et les entrainements ou recyclage périodiques.
Paragraphe 1: La formation initiale
Devenir Aviateur ne s’improvise pas. Cela requiert une formation de plusieurs
années, adaptée au type de carrière (officier ou sous-officier) et à la spécialité
aéronautique envisagée. Les sous-officiers reçoivent une formation en conformité avec
les responsabilités afférentes à leur catégorie. En particulier, les qualités indispensables
à l’exercice du métier de mécanicien aéronautique (motivation, rigueur, méthode et
patience) seront inculquées aux sous-officiers techniciens aéronautiques appelés à
intervenir sur des systèmes complexes et coûteux. Quant aux officiers, ingénieurs
aéronautiques et pilotes, ils sont astreints à une formation militaire et professionnelle qui
leur permet à terme d’acquérir les compétences attendues à la fois en tant que combattant
et chef militaire, opérateurs d’aéronefs et expert du milieu aéronautique voire spatial.
Contrairement à l’AAB qui n’a aucun centre de formation en aéronautique, la
NAF, dispose de six (06) écoles qui lui permettent d’atteindre ses objectifs opérationnels
66
et de s’affranchir de la dépendance extérieure pour la disponibilité du personnel
naviguant. Ces centres constituent des atouts exploitables par la coopération bilatérale
entre ces deux armées.
L’Ecole de Pilotage 401, est le centre de formation de jeunes gens appelés à servir
dans l’Armée de l’Air Nigériane (Ab-initiaux). Ce centre autonome de formation située
dans la ville de Kaduna est équipé de divers avions ainsi que des infrastructures
académiques adéquates. Elle exploite les avions de type DA-40 et Super Mushshack, et a
la capacité de former une soixantaine de pilotes par an. Elle partage les infrastructures de
la Base Aérienne de Kaduna avec l’Institut de Technologies de l’Armée de l’Air en charge
de la formation du personnel technique.
Le centre nigérian de formation avancée au pilotage d’avions de chasse est l’école
de pilotage 403. Il forme les apprenants ayant démontré des aptitudes avérées au pilotage
d’avion de chasse lors de leur formation à l’école de pilotage 401. Ce centre, situé à
Kano157 est équipé de plusieurs Alpha Jet et L-39ZA Albatros et assure également la
formation des pilotes instructeurs.
Quant à l’école de formation sur hélicoptères de combat, elle est située à Enugu158
et constitue le vivier de l’Armée de l’Air Nigériane en personnels spécialistes de la voilure
tournante. Créée en 2012 et baptisé 305 Flying Training School, elle forme les pilotes
d’hélicoptères de l’armée de l’air nigériane ayant terminé leur formation basique au 301
Flying Training School de Kaduna. Cette école est dotée d’hélicoptères de type Agusta
Westland AW109E/LUH, Mil Mi-24Vs, Mi-24P et des Mi-35 Hind.
Enfin l’Ecole Internationale d’Aviation (IAC)159 de Illorin est chargée de la
formation des pilotes militaires de transport. Fruit d’un partenariat public-privé, cette
Deuxième ville du Nigéria par sa population. Située au Nord du pays, elle est la capitale de l’Etat de
Kano.
157
158
L’International Helicopter Flying School est situé à Enugu, la ville des collines au Sud-Est du Nigéria.
L’International Aviation College est une propriété de l’Etat de Kwara à l’Ouest du Nigéria à 230 Km de
la ville béninoise Parakou.
159
67
école créée en 2011 est dotée d’équipements et d’infrastructures conformes aux normes
internationales.
Partant de l’opportunité qu’offrent ces différents centres et en s’inspirant du
modèle franco-allemand, un véritable partenariat en matière de formation pourrait
s’établir. En effet, suite à l’introduction du nouvel hélicoptère de combat «Tigre»,
l’Allemagne et la France ont développé le projet d’une formation commune de pilotes et
de techniciens160. Inaugurée le 1er juillet 2003, l’école commune de pilotage a été basée
au Luc-en-Provence, sur le site de l’Ecole d’application de l’aviation légère de l’armée
de terre (EAALAT), et celle de formation du personnel technique à l’Ecole technique de
l’armée de l’air allemande (Technische Schule der Luftwaffe) à Fassberg, en Basse-Saxe.
Aujourd’hui, les missions opérationnelles actuelles confiées à l’Armée de l’Air
Béninoise qui pour la plupart restent communes aux armées, nécessitent une évolution
pour s’adapter aux nouvelles menaces sous régionales. Pour ce faire, un accent particulier
devra être mis sur la formation opérationnelle et sur les échanges interactifs avec l’Armée
de l’Air nigériane pour profiter de son expérience. Par exemple, la mise en place d’un
cadre de concertation permettrait aux instructeurs du Centre d’Instruction des Fusiliers
commandos de l’Air (CIFCA), d’échanger et partager les connaissances avec leurs
homologues du Centre d’Entrainement des Bataillons (RTC) de l’Armée de l’Air
Nigériane. L’objectif étant d’harmoniser les techniques spécifiques à la défense des Bases
Aériennes dans un environnement en proie aux menaces asymétriques et former les
personnels aussi bien à la guerre conventionnelle que celle asymétrique.
Outres la formation initiale du personnel, les professionnels pilotes et techniciens
aéronautiques pourront aussi uniformiser un tant soit peu leur savoir et savoir-faire lors
des stages de recyclage et ceux opérationnels, gage d’une efficacité lors des opérations
militaires conjointes.
160
S. B. GAREIS et N. LEONHARD, La coopération militaire franco-allemande : fer de lance des forces
armées européennes ?, p.492.
68
Paragraphe 2: Les recyclages, stages et pôles opérationnels
Les simulateurs de vol, grâce à l’environnement ultra réalistes de vol qu’ils
offrent, permettent la préparation des pilotes et le maintien de leur qualification à un coût
réduit. Ils sont de plus en plus utilisés tant dans la formation initiale que dans la formation
continue des pilotes professionnels. Les conditions opérationnelles des pilotes
d’hélicoptères appelés à opérer des aéronefs sans possibilité d’éjection ni de planer 161 en
cas de panne moteur exigent d’eux une réactivité immédiate dès les premiers instants.
C’est pourquoi un entraînement annuel aux procédures d’urgence de diverses pannes
telles que les autorotations162 et la rupture du torque anti-couple163 leur est prescrit dans
les FAB. Ainsi les pilotes béninois spécialistes des voilures tournantes sont astreints à un
entraînement annuel dans les pays étrangers du fait de l’indisponibilité du matériel
adéquat sur le territoire national.
Aujourd’hui, outre les possibilités d’entrainement dans les centres de formation
de la NAF, l’entreprise nigériane CAVERTON offre la possibilité aux pilotes
d’hélicoptères de s’entraîner sur son simulateur de vol de nouvelle génération. Créé en
2002, CAVERTON est une entreprise civile nigériane de soutien logistique en Afrique
Subsaharienne, capable de procurer des solutions complètes de maintenance des
plateformes maritimes et aéronautiques. Elle dispose depuis avril 2021, grâce au contrat
avec THALES, d’un centre d’entraînement sur simulateur de vol d’hélicoptère AW-139
« Thales Reality H » de niveau 3D « Full Flight Simulator ».
La République Fédérale du Nigéria a connu une longue période d’instabilité
politique et vécu l’expérience douloureuse de la guerre civile. Aussi, ce pays fait-il face
depuis quelques années à l’une des manifestations les plus violentes du terrorisme avec
Voler sans aucune aide motorisée, juste par le seul soutien de l’air. Les hélicoptères n’ont pas cette
capacité en raison de leur voilure tournante par une boite de transmission reliée au moteur.
161
Un état de vol d’urgence où le rotor principal d’un hélicoptère tourne sous l’action de l’air en lieu et
place du moteur. En réalité, l’hélicoptère tombe sous l’effet de la gravité et le vent que rencontre le rotor
dans sa chute, le fait tourner.
162
Rotor auxiliaire de petite taille situé à l’arrière d’un hélicoptère et dont le pas des pales est actionné
par les pédales pour contrôler la machine et l’empêcher vriller sur l’effet du rotor principal.
163
69
les affres de la secte Boko Haram164. C’est donc fort de cela que les forces armées de ce
pays, ont acquis une certaine expérience en matière de sécurité et de lutte contre le
terrorisme que les personnels béninois pourraient capitaliser à travers des stages
opérationnels. Le Bénin, relativement stable depuis 1972165, traverse depuis bien
longtemps, une période de paix qui nécessite la prise de mesures adéquates pour anticiper
sur le terrorisme transfrontalier de plus en plus menaçant. Outre l’enlèvement au parc
Pendjari par un groupe djihadiste de deux touristes français le 04 mai 2019 au cours
duquel leur guide touristique a été abattu, le pays demeure stable. L’unique agression qu’a
connu le pays remonte à l’invasion aérienne des mercenaires du 16 janvier 1977 conduite
par le célèbre mercenaire français Bob Denard qui s’est illustré au cours de sa carrière par
ses nombreux faits d’armes sur le continent (Angola, Comores, Katanga, Cabinda). En
effet, au petit matin de ce jour, un avion DC-7 s’est posé à l’improviste sur la piste de la
Base Aérienne de Cotonou et a débarqué une centaine de mercenaires armés. L’«
Opération crevette » qui échoua contre le président Mathieu KEREKOU aurait été
contenue sur le tarmac si le pays était doté d’une armée de l’air équipée. Heureusement,
ces mercenaires furent repoussés dans leur offensive dans la ville grâce en partie aux
militaires nord-coréens présents à Cotonou en vertu des accords militaires entre
républiques socialistes.
En dépit de cet acte qui révèle la fragilité du dispositif de défense aérienne,
l’inactivité opérationnelle aérienne s’est accrue et n’a eu cesse d’éroder de plus en plus la
motivation des personnels, qui à la recherche d’expérience et d’intérêts financiers,
enchainent les missions onusiennes.
C’est pourquoi, au-delà de l’assistance nigériane dont elle bénéficie de façon
sporadique, il urge que le Bénin trouve des valeurs d’échange pour profiter de
l’expérience aéronautique de son voisin afin d’assurer au terme sa propre sécurité. En
84 attaques en 2015 selon l’ONG britannique Action on Armed Violence (AVOA) et plus de 100 attaques
en 2021 selon BBC Afrique.
164
165
Longtemps considéré comme «l'enfant malade de l'Afrique» en raison de son instabilité chronique, le
Dahomey a connu, de 1960 à 1972, une douzaine de coups d'États (dont cinq réussis, en 1963, 1965, 1967,
1969 et 1972), une dizaine de présidents (six militaires et cinq civils) et changea cinq fois de Constitution
et connu dix-sept ans d'un régime militaire d'inspiration marxiste-léniniste.
70
réalité comme le souligne Joseph Gieco dans ’’Anarchy and the limits of Cooperation :
A Realist Critique of of the Newest Liberal Instutionalism’’, « les pays doivent veiller à
leur propre sécurité parce qu’il n’existe aucune autorité capable d’empêcher d’autres
Etats d’employer la violence ou les menaces de violence pour les détruire ou les
asservir »166. A cet égard, une mise à disposition permanente de personnels instructeurs
dans les écoles nigérianes parait une piste exploitable. La mise en place de quelques pôles
aéronautiques militaires conjoints pour des projets opérationnels communs en accord
avec les réformes engagées par le Bénin, pourrait accroître les efforts de ce pays, renforcer
les liens inter-Etats et accroitre sa résilience contre le terro-bantitisme. L’un de ces pôles
serait formé d’une unité exploitant entre autres des aéronefs et drones militaires dédiés à
la surveillance des côtes maritimes et des frontières terrestres. Ces pôles pourront
s’intégrer au projet de réforme de l’Armée de l’Air du Bénin qui prévoit un redéploiement
opérationnel de l’AAB constitué de deux Bases Aériennes à Cana et Parakou et des
Détachements Aériens Permanents (DAP) à Kandi, Natitingou et Cotonou. La Base
Aérienne de Cotonou, qui concentre actuellement les activités aériennes, devenue DAP,
pourrait donc abriter l’unité équipée de drones militaires.
L’efficacité de ces pôles opérationnels dépend de la disponibilité de structures de
maintenance du matériel volant en accord avec les ambitions partagées.
Section 2: Le pôle maintenance des appareils et transfert de technologies
En ce qui concerne la maintenance du matériel aéronautique et abordant la
question des contrats onéreux d’entretien de matériels volants à l’étranger, une solution
visant à l’autonomisation technique et au transfert de technologie par la mise en place
d’un centre commun de maintenance du matériel volant avec le Nigéria, est préconisée.
166
J. GRIECO, « Anarchy and the limits of Cooperation : A Realist Critique of of the Newest Liberal
Instutionalism », International Organization 42, n°3, 1998, pp.485-507.
71
Paragraphe 1: La maintenance des appareils sur place ou à proximité
Les capacités aéronautiques des armées d’Afrique subsaharienne ne seront
renforcées que lorsque sera rompu le cercle vicieux de l’indisponibilité technique des
aéronefs du fait des contrats onéreux d’entretien dont ils font l’objet. Pour ce faire, les
Etats partenaires régionaux et les entreprises civiles nationales devront mettre sur pied
une initiative conjointe afin d’assurer des niveaux élevés de maintenance du matériel
volant. A cet égard, le Nigéria qui dispose d’une sérieuse avance en terme de
développement aéronautico-industriel sur ses voisins ouest-africains, devra servir de
leader dans cette marche vers l’émancipation des armées africaines. En effet, le Nigéria
dispose de plusieurs unités de maintenance de matériel et des solutions dans des
entreprises civiles nationales. La 16ème Escadrille Logistique de Kainji dans l’Etat du
Niger au Nigéria a pour rôle d’assurer la maintenance des matériels volants majeurs de la
NAF. Après l’acquisition de matériels techniques et les stages de renforcement des
capacités au Canada offerts aux personnels de cette unité, elle a aujourd’hui acquit une
complète autonomie technique. Les unités de maintenance déconcentrées telles que la 401
Aircraft Maintenance Depot de Ikeja et la 403 Electronic Maintenance Depot de Shasha
quant à elles, assurent la disponibilité permanente des aéronefs militaires nigérians dans
leurs différentes zones d’opération. Outre ces structures militaires, la NAF est aussi
engagée dans un partenariat avec l’entreprise civile nationale CAVERTON pour la
maintenance de ses hélicoptères militaires en particulier l’AW-139, l’AW-109, l’A-109
Power et le Bell 412.
Aussi, appert-il nécessaire que soit mis en place dans la sous-région, un
programme commun et concerté d’acquisition et de maintenance de vecteurs aériens. En
effet, les coûts de maintenance et d’acquisition de pièce de rechange sont réduits lorsque
les commandes sont effectuées en gros auprès d’un même fournisseur. Sans un tel
programme, les pays comme le Bénin qui ne disposent pas d’un nombre suffisant
d’appareils ou de capacités de maintenance pour garantir la disponibilité opérationnelle
de leurs appareils volants, la stabilité sécuritaire régionale sera difficile à atteindre. Le
nombre insuffisant d’aéronefs ne leur permettra pas d’assurer simultanément les activités
de maintenance au dépôt, d’entraînement et de service opérationnel au profit de la
72
communauté de sécurité régionale. Au sein de l’AAB, 6.11%
167
des personnels
détiennent une qualification technique aéronautique. Ces spécialistes ont au fil des années
acquis des connaissances théoriques et pratiques à travers plusieurs stages de qualification
à l’étranger. En revanche, l’équipement et les infrastructures militaires de maintenance se
résument à ceux en dotation à la BACO et le budget de défense peine à en accroître de
manière visible les capacités. Cette politique entretient un cycle contre-productif
décourageant et mène inexorablement à l’impasse168. L’inexistence d’une flotte aérienne
importante, et des structures civiles privées capables d’assurer la maintenance de haut
niveau et la fourniture des pièces de rechanges ont exacerbé la sempiternelle et fastidieuse
question de l’opérabilité de l’AAB. Si le projet de la Base Logistique de Parakou, peine
encore se concrétiser, il pourrait aujourd’hui servir à un projet bilatéral avec la NAF en
matière de maintenance du matériel. Ainsi, à travers la coopération entre la NAF et
l’AAB, la maintenance du matériel volant pourra trouver une réponse adéquate dans un
centre commun et par la même occasion, rendre possible le transfert de compétences
technologiques tant recherché par l’AAB.
En réalité, la difficulté qu’a le Bénin à se doter d’une armée de l’air équipée,
efficace et respectée tout comme celle relative à la mise en place une coopération militaire
durable et efficace avec le Nigéria, tiennent principalement aux facteurs politiques. Seules
les initiatives aériennes soutenues peuvent affronter les incitatifs politiques
fondamentales qui s’opposent jusque-là, à la reforme devant aboutir à la dotation de
l’AAB en matériels volants très coûteux pour l’économie du pays. La multiplicité des
menaces internes et externes nécessite une réforme du secteur de sécurité nationale avec
la participation de toutes les forces vives afin de redéfinir le mandat des Forces Armées
Béninoises. Pour ce faire, il faut poursuivre le projet de la restructuration de l’AAB à
l’image de la réforme ayant abouti à la création de la Police Républicaine et la Garde
167
Etat-Major de l’Armée de l’Air, 2020.
168
Ryan McCaughan, Commandant USAF, « les défis de la mobilité aérienne en Afrique subsaharienne,
ASPJ Afrique & Francophonie », 2017, p.91.
73
Nationale169. Modifier le format des troupes et moyens aériens jusque-là regroupées dans
deux (02) Bases Aériennes, à de plus petites unités légères, mobiles et modulables en
fonction de la mission et équipés puis formées aux tactiques d’observation de l’aviation
légère.
Adapter les missions et équipements de l’Armée de l’Air aux nouvelles menaces
et intégrer ces missions au sein d’une stratégie de défense globale. En effet, très peu de
pays africains disposent aujourd’hui d’une stratégie de sécurité nationale bien définie,
pour que leurs armées disposent d’un plan d’acquisition de matériels et de formation
opérationnelle du personnel adéquat. Un tel guide est pourtant essentiel pour l’arrimage
des ressources militaires aux priorités nationales. Il permettra à l’Etat de coordonner les
efforts et fixer les responsabilités des secteurs d’activité de sorte que les institutions
civiles et les FDS bénéficient de ressources convenables. Cela favorisera en outre le nonchevauchement des missions de défense et celles de sécurité publiques, fréquemment
observé et qui font du militaire béninois un « homme à tout faire sauf ce en quoi il est
qualifié ». Il revient donc aux élites politico-militaires d’identifier clairement la mission
des institutions de sécurité et les intégrer au processus de planification stratégique afin de
former la troupe et lui fournir les ressources adéquates. C’est à cette carence stratégique
que l’on doit la diminution drastique des capacités aériennes des FAB après la fin de la
Guerre froide.
La coopération bilatérale avec la NAF est en mesure de garantir dans un jeu à
somme nulle ou du dilemme du prisonnier170 développé par Robert Axelrod dans
‘’L’évolution de la coopération’’, un entraînement conjoint avec l’AAB puis la fourniture
169
Quatrième composante des FAB en vertu de la loi 2020-15 du 03 juillet 2020, modifiant et complétant
la loi n°90-016 du 18 juin 1990 portant création des Forces Armées Béninoises.
170
Le dilemme du prisonnier est développé dans l’ouvrage ‘’Comment réussir dans un monde d’égoïstes’’
ou du classique ‘’L’évolution de la coopération’’ de Robert Axelrod, publiés en 1984 qui explorent les
possibilités de coopération dans un schéma où chacun peut faire cavalier seul. Si les deux décident de
coopérer, le bénéfice est maximum pour les deux. Mais si l’un des deux trahit, le coopérant se retrouvent
totalement perdant.
74
des services d’acquisition de pièces et d’entretien du matériel à un coût réduit. En
revanche l’armée de l’air béninoise devra compter sur le soutien du secteur industriel
national pour développer les compétences et capacités nationales capables de soutenir les
efforts bilatéraux.
Paragraphe 2: Effets d’entraînement de l’industrie de défense nigériane
Enjeu central de la politique de coopération nationale, le développement d’une
industrie de défense déjà élaborée par le Nigéria, doit être intégrée à la coopération
bilatérale entre l’AAB et la NAF. En effet, les efforts nécessaires pour un développement
technologique et industriel ne se trouvent que dans la mise en place d’une industrie de
défense, terreau de la souveraineté nationale et exploitable pour insuffler un élan
économique au pays. De nombreux pays en développement (PED) aux lendemains de la
guerre froide, comme l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud, aujourd’hui considérés comme
émergents, se sont penchés sur le développement d’une industrie de défense autonome.
L’impact technologique qui en a découlé s’est étendu sur de nombreux secteurs
industriels de haute technologie, comme l’automobile ou l’aéronautique civile.
En France, l’industrie de défense constitue un secteur stratégique et un levier
conduit par le gouvernement des mains de maître pour ses politiques publiques. C’est
« un des rares secteurs avec l’aéronautique à contribuer positivement à la balance
commerciale du pays »171. Une des plus grandes réalisations industrielles militaires
partagée à l’échelle européenne est la construction par Airbus Military Company (France,
Royaume-Uni, Allemagne, Belgique, Espagne) de l’avion de transport de troupes et de
matériel A400 M.
A contrario, il est noté une quasi-inexistence du secteur au Bénin et sa renaissance
au Nigéria qui a consacré en 2019 un budget de 1,6 milliard de dollar US à la défense en
prévoyant porter ce chiffre à 2,2 milliards d’ici 2024172. En effet, c’est dans les années
171
URL Secteurs d'intervention : Défense - GICAT - Groupement des Industries françaises de Défense et
de Sécurité terrestres et aéroterrestres.
DUBLIN- Business Wire, L’avenir de l’industrie nigériane de la défense-attractivité du marché, paysage
et prévision à 2024, 2019
172
75
1980, que la NAF, dans le cadre du programme d’ingénierie aéronautique et industrielle
(AIEP), avait réussi à produire localement un avion léger dédié à la formation du
personnel baptisé Air Beetle ABT-18. En 1988, ses capacités technologiques étant en plein
essor, soixante (60) exemplaires de cet avion furent produits. L’Air Beetle ABT-18 a été
utilisé par la NAF pour la formation du personnel navigant en remplacement au Bulldog123173. C’est cet exploit qui a constitué pour ce pays, le pas précurseur d’une ambition de
se hisser parmi les pays constructeurs d’avions. Si ce projet a été abandonné, il convient
de souligner qu’il a significativement contribué au développement industriel du Nigéria.
Aussi, ce pays va-t-il grâce à l’assistance technique chinoise, lancer le
NigComSat-1 en 2007, puis le NigComSat-1R en 2011.
Image 7: Quelques avions ABT-18 nigérians
Source : www.defensenigeria.wordpress.com174
URL
https://www.businesswire.com/news/home/20190322005154/en/The-1.6-Billion-NigerianDefense-Industry-2019-to2024-Market-Attractiveness-Competitive-Landscape-and-Forecasts consulté le
24 mai 2021 à 00 :45 :51.
D.A Olawuyi, S. Thomas, P.O Jemitola, A.G Udu, D.S Nyitamen, “methodology for cost estimation and
manufacturing framework for the modification of ABT-18 aircraft to an Unmanned Aerial Vehicle”,
Academy Journal of Science and Engineering 9 (1), 2015 p. 65.
173
174
URL https://defensenigeria.wordpress.com/2018/04/30/who-is-to-blame-the-death-of-nigeriasdefense-industry/amp/ consulté le 04 avril 2021.
76
Le Nigéria peut ainsi profiter du cadre que lui offre la coopération pour
promouvoir ses produits à travers une exploitation de ses Unmanned Aerial Vehicle175
(UAV) ou drones produits localement au sein de la communauté régionale. En effet,
l’Armée de l’Air nigériane produit depuis quelques années des drones militaires tels que
« Gulma », « Amebo » et « Tsaigumi »176 et a créé une unité opérationnelle chargée de la
conduite des missions d’Intelligence, de Surveillance et de Reconnaissance (ISR).
L’avion télé-piloté « star tilt-rotor » a par exemple démontré ses capacités à effectuer
efficacement des missions de surveillance aérienne. Il décolle verticalement, peut aller
jusqu’à cinq kilomètres et peut être équipé d’une bombe de 250 kg. De même, suite au
décès d’un spécialiste des Engins Explosifs Improvisés (EEI) en pleine activité à Kaduna,
la NAF a développé un prototype amélioré de son robot de désamorçage des EEI. Connu
sous le nom d’UGV-2177 et utilisé dans les bases aériennes, ce robot a été construit pour
remplacer les humains dans les situations très dangereuses telles que la manipulation
d’EEI et de bombes. Un profil de carrière a ainsi été créé pour les spécialistes (pilotes,
mécaniciens et ingénieurs de conception) des robots et aéronefs télépilotés. Cela constitue
une véritable avancée sous régionale ouest africaine dont devrait s’inspirer l’aviation
béninoise. L’omniprésence de ces engins télé pilotés dans les opérations contemporaines,
impose à l’Armée de l’Air du Bénin d’en faire une de ses priorités dans ses échanges avec
l’Armée de l’Air nigériane.
175
Engin Aérien sans pilote.
176
Nigerian Made Drones Peoples Trust Africa URL 6
177
Unmanned Ground Vehicle ou engin terrestre sans pilote.
77
Image 8: Présentation officielle du drone militaire nigérian « Gulma » en 2013.
Source : (icirnigeria.org) cliché Décembre 2013.
Avec de tels appareils accessibles à l’AAB à travers la coopération, ces deux
armées pourraient coordonner leurs actions dans la conduite des missions de
reconnaissance et d’attaque, de contre-insurrection, ainsi que des missions de surveillance
des frontières.
Aujourd’hui, chacune des composantes de l’Armée Nigériane est équipée de
drones et les premiers pilotes drones ont été entièrement formés à l’école de pilotage 401
de Kaduna en 2018178. Tous ces efforts industriels et opérationnels constituent autant de
L’armée de l’air nigériane obtient les premiers pilotes de drones formés localement - defenceWeb .
URL https://www.defenceweb.co.za/aerospace/aerospace-aerospace/nigerian-air-force-graduates-firstlocally-trained-uav-pilots/ .
178
78
potentialités inexploitées par la coopération entre la NAF et l’AAB. La mise en œuvre
d’une coopération opérationnelle pourrait ainsi accroître la résilience des armées aux
défis sécuritaires communs. Le Bénin et les pays de la région ouest-africaine, dont la
coopération militaire régionale reste insuffisante contre Boko Haram pourront alors
mettre en place une cellule multinationale de coordination en matière de renseignement
fournis par les drones typiquement africains comme Gulma179.
Conclusion partielle de la deuxième partie
En somme, la création et l’opérationnalisation de quelques pôles aéronautiques en
accord avec les ambitions communes ainsi que la formation des personnels demeurent
essentielles pour l’optimisation de la coopération bilatérale entre l’AAB et la NAF. La
conduite de mission ISR coordonnées à partir d’un Centre Multinational d’Appui Aérien
aux Opérations Maritimes soutiendrait les efforts des marines nationales dans la lutte
contre la piraterie maritime sur les côtes bénino-nigérianes. De même, la mise en place
d’une QRF aérienne dotée d’avions de chasse, de reconnaissance, de drones et
d’hélicoptères de combat appuierait les opérations terrestres. Cela exige de permanents
arbitrages pour un arrimage des budgets de défense aux ambitions communautaires. Pour
ce qui est de la maintenance du matériel aéronautique, une autonomisation technique et
un transfert de technologie seront garantis avec la mise en place d’un centre commun de
maintenance du matériel volant.
Par ailleurs, l’entraînement et la formation des personnels dans des centres
communs aux deux armées de l’Air, garantiront de véritables aviateurs capables de
conduire efficacement des manœuvres conjointes. Et avec de tels professionnels, l’AAB
pourra à travers les missions onusiennes, maintenir l’opérabilité de ses aviateurs et la
disponibilité du matériel en engageant ceux-ci dans les missions de maintien de paix pour
profiter de la rente onusienne de la paix.
179
Gulma signifie « rumeurs » en Haoussa.
79
Enfin, enjeu central à la politique de coopération nationale, le développement d’une
l’industrie de défense déjà existante au Nigéria, doit être intégrée à la politique de
coopération bilatérale entre l’AAB et la NAF.
80
CONCLUSION GENERALE
Somme toute, la coopération militaire entre l’AAB et la NAF, dynamique à ses
débuts, s’est progressivement affaiblie au fil des années. Elle constitue effectivement un
enjeu majeur dont la redynamisation passe par sa formalisation et une réadaptation aux
défis sécuritaires sous régionaux actuels. La proximité et les atouts opérationnels des
armées de l’air nigériane et béninoise militent en faveur d’un renforcement de la
coopération bilatérale entre elles. En réalité, malgré l’écart opérationnel entre l’AAB et
la NAF, la création et l’opérationnalisation de quelques pôles aéronautiques et la
formation des personnels, permettraient à cette coopération bilatérale de devenir
davantage utile aux deux nations dans leur lutte contre le terro-banditisme.
D’un côté, l’Armée de l’Air du Bénin (AAB), malgré les diverses mutations
qu’elle a connues ainsi que le dévouement et le professionnalisme de ses hommes, peine
toujours à relever son niveau opérationnel. Si pendant la guerre froide elle avait disposé
d’un strict minimum d’aéronefs militaires en bon état, la période suivante aurait été
marquée par une baisse drastique d’activités aériennes qui a entravé son opérabilité.
L’insuffisance de ressources dédiées à la formation, à l’entretien et à l’opérationnalisation
des personnels, a progressivement condamné les aviateurs à l’utilisation de matériels
d’occasion et accentué leur dépendance technique vis à vis des partenaires étrangers. Le
faible développement du secteur aéronautique dans le pays, a conduit les personnels
navigants et techniques au « piège de l’aviateur béninois ». Si les premiers se contentent
d’une carrière de gestion administrative, les seconds sont enclins à quitter l’institution
militaire pour des horizons plus prometteurs à leurs yeux hypothéquant davantage le
maintien opérationnel des aéronefs. Aujourd’hui, ce pays francophone, tributaire de
l’Assistance Militaire Techniques française, manque de stratégies pour capitaliser les
multiples atouts aéronautiques et technologiques de son vaste et dynamique voisin avec
qui il partage les mêmes menaces.
De l’autre, l’Armée de l’Air du Nigéria, la Nigerian Air Force (NAF) a, à sa
création subi une révolution opérationnelle qui lui a permis d’être aujourd’hui au centre
des opérations nationales d’envergure et de devenir une référence sous régionale. Pourtant
à ses débuts en 1964, elle ne disposait que de moyens modestes et dépendait
81
essentiellement de l’assistance technique allemande et britannique. Devenue aujourd’hui
une composante indépendante des forces armées fédérales, elle est dotée en capacités de
production d’aéronefs, de maintenance technique et de capacités opérationnelles avérées.
Ses nombreux centres autonomes de formation et de maintenance ajoutés à l’étendue et
la diversité de sa flotte d’aéronefs militaires témoignent d’un niveau de maturité inégalé
dans la sous-région ouest africaine. Toutefois, son efficacité limitée dans la conduite des
opérations contre les groupes djihadistes, remettent en cause le patriotisme et le
professionnalisme de ses aviateurs.
En réalité, l’Armée de l’Air du Bénin est victime d’une sclérose opérationnelle
plusieurs décennies après les indépendances et la fin de la guerre froide. Elle devient de
plus en plus oisive alors que les opérations aériennes sont essentielles pour la conduite
des actions militaires. Faible de ses capacités, elle demeure sans menace ennemie définie
ou extérieure à contrer.180 Son niveau opérationnel peine à se relever à partir des
potentialités nationales propres et celles des partenaires à travers une coopération
indépendante. C’est pourquoi, la coopération militaire entreprise par les armées de l’air
béninoise et nigériane, vieille de 42 ans nécessite une réorientation au regard des
dynamiques mondiales en cours et des nouveaux contextes régionaux. La relecture
envisagée devrait permettre « d’optimiser les points fort » et « d’atténuer les faiblesses ».
La sensibilité du domaine (aéronautique militaire) et les coûts liés à son existence militent
en faveur d’une réflexion stratégique aiguë. La stratégie de bon voisinage longtemps
adoptée par le Bénin, n’est plus adaptée à la situation sécuritaire sous-régionale. En
réalité, la situation actuelle de ce pays nécessite un aguerrissement des Forces de Défense
et de Sécurité. La menace aujourd’hui étant le terrorisme et la criminalité transnationale,
une armée non équipée d’aéronefs pourvus de système d’armes et de moyens
d’observation aérienne contribuera difficilement à la lutte contre cette menace.
Ainsi, la conduite de mission ISR coordonnées à partir d’un Centre Multinational
d’Appui Aérien aux Opérations Maritimes soutiendrait les efforts des marines nationales
L’un des postulats énoncés par Stanislaw Andrzejewski est que « les forces armées oisives, sans menace
extérieure à contrer, risquent davantage de s’ingérer dans la politique intérieure ».
180
82
dans la lutte contre la piraterie maritime sur les côtes bénino-nigérianes. De même, la
mise en place d’une QRF aérienne dotée d’avions de chasse, de reconnaissance, de drones
et d’hélicoptères de combat appuierait les opérations terrestres. Cela exige de permanents
arbitrages pour un arrimage des budgets de défense aux ambitions communautaires. En
ce qui concerne la maintenance du matériel aéronautique, une autonomisation technique
et un transfert de technologie seront garantis avec la mise en place d’un centre commun
de maintenance du matériel volant. Par ailleurs, l’entraînement et la formation des
personnels dans des centres communs aux deux armées de l’Air, pourraient former de
véritables aviateurs capables de conduire efficacement des manœuvres conjointes. Avec
de tels professionnels, l’AAB pourra à travers les missions onusiennes, maintenir
l’opérabilité de ses aviateurs et la disponibilité du matériel en engageant ceux-ci dans les
missions de maintien de paix pour profiter de la rente onusienne de la paix.
Enfin, l’intégration du développement d’une industrie de défense devra être un
enjeu central à la politique de coopération bilatérale entre l’AAB et la NAF. Elle rendrait
accessible non seulement les plateformes industrielles d’une armée à l’autre mais aussi
créerait les conditions favorables aux innovations technologiques militaires communes.
En prélude à cela, l’accessibilité des drones nigérians tels que « Gulma », « Amebo » et
« Tsaigumi », à l’AAB, permettrait aux duo d’armées de coordonner leurs actions dans la
conduite des missions de reconnaissance et d’attaque, ainsi que des missions de
surveillance des frontières.
Mais un renforcement de la coopération bilatérale entre l’AAB et la NAF ne
nécessite-t-il pas que la diplomatie des deux pays soit convaincue de son opportunité dans
une sous-région déjà engagée dans une coopération sécuritaire qui se veut à terme
panafricaine ?
83
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90
ANNEXES
Annexe n°1 : Liste des personnes interviewées
N°
GRADE
NOM
PRENOM
QUALITE OU SERVICE
1
GDA (ER)
MAMA SIKA
Seydou
Ancien COFA
2
GBA (ER)
ADAM
Taffa
Ancien DCM/MDN et ancien
COFA
ancien
Pilote
de
Chasse/Pilote Hélico
3
GBR (ER)
ADOSSOU
Etienne
Ancien Pilote de Chasse
4
COL (ER)
GOGUE
Abdoulaye
Ancien CEMFA/Ingénieur
5
COL (ER)
BATOSSI
Léonard
Ancien CEMFA/Pilote Hélico
6
COL (ER)
GBAGUIDI
Charles
Ancien CEMFA/Pilote Avion
7
COL
ALAO
Bariou
Chef PSRI/EMG
8
COL (NIG)
SHOBO
Babatounde
Attaché de Défense du Nigéria
9
COL
AVOCANH
Hermann
CEMAA
10
LCL
OSSENI
Rachidi
DRH/EMAA
11
CDT
BIOBOU
Luc
Pilote Hélico
12
CDT
AHOUNOU
Claude
Pilote Hélico
13
CDT
SOHOU
Fernand
Pilote Hélico
14
CNE
BAKO
Idrissou
Officier de l’AA
15
LTN
LOFFA
Lambert
Officier de l’AA/Technicien
16
LTN
AKPA
Comlan
Officier de l’AA/Pilote Avion
17
LTN
ZINSOU
Bertrand
Officier de l’AA
18
ADC
POHOUEGBE
Gaëtan
Technicien Avion/Hélico
19
SCH
ZOGBOCHI
Victor
Technicien Avion/Hélico
20
SCH
BABATOUNDE
Hermann
Technicien Avion/Hélico
21
Mr
DOSSOU
Bénoit
DCMOP/MDN
a
22
Mr
TAIROU
M. Aboudou
DAF/MDN
23
Mr
HOUNKPONOU
Roméo
DAAMO/MAEC
24
Mr
AKPOHA
Bienvenu
Consultant en RI
25
Mr (NIG)
EWERINDE O.
Jerôme
Chef Protocole
Nigéria au Bénin
ambassade
du
b
Annexe n°2 : Guide d’Entretien
Introduction
Salut militaire, formules de salutations d’usage au Bénin et selon le rang social de
l’informateur : santé de la famille, état des activités.
Je suis le Capitaine CHABI Ibrahim, j’entreprends un travail de recherche sur la
coopération entre les armées de l’air béninoise et nigériane ; ceci dans le cadre des travaux
de recherches pour l’obtention d’un Master II Professionnel en Etudes Stratégiques,
Sécurité et Politique de Défense organisé par l’université de Parakou en partenariat avec
les Forces Armées Béninoises. Ce travail est réalisé sous la supervision du Docteur
Guillaume ATTOLOU MOUMOUNI et du Professeur Moktar ADAMOU. Les données
collectées seront couvertes d’anonymat et restent confidentielles. Je vous remercie d'avoir
accepté de m’accorder cette interview malgré vos multiples occupations et vous prie de
vous mettre à l'aise au cours de l’échange qui va durer environ 20 à 45 minutes.
Vous avez été sélectionné pour nous permettre de recueillir vos opinions sur l’histoire de
cette coopération et l’opportunité d’un renforcement de la politique de coopération entre
l’AAB et la NAF afin de dégager des pistes pour son optimisation dans la lutte contre les
nouvelles menaces. L’objectif principal est de faire un diagnostic stratégique des atouts
et faiblesses de ces deux composantes aériennes afin de proposer des solutions concrètes
visant à l’optimisation de leur coopération.
0. Identification de la cible
c
0.1. Nom et prénom(s) :
0.2. Sexe :
0.3. Age :
0.4. Grade
0.5. Formation de base :
0.6. Fonction précédente :
0.7. Fonction actuelle :
0.8. Lieu de résidence :
1.
Historique et état des lieux de la coopération
1.1.
Historique de la coopération entre l’AAB et la NAF
1.2.
Fondements juridiques
1.3.
Actions de coopération ayant eu lieu
1.4.
Offre de formation
1.5.
Etat des lieux de la coopération entre l’AAB et la NAF
1.6.
Difficultés
1.7.
Coopérations courantes
2. Analyse des Forces et Faiblesses, Opportunités et Menaces (SWOT) de
L’AAB et de la NAF
2.1.
Atouts et difficultés de l’AAB
2.2.
Opportunités béninoises pour le Nigéria
2.3.
Atouts et faiblesses de la NAF
2.4.
Opportunités nigérianes pour le Bénin
2.5.
Contraintes et facteurs de risque de la coopération bilatérale
d
3.
4.
Enjeux et perspectives d’une meilleure coopération
3.1.
Enjeux sous régionaux
3.2.
Enjeux multipolaires
3.3.
Formation du personnel
3.4.
Maintenance et acquisition du matériel
3.5.
Mécanismes de financement
3.6.
Appui aux forces de surface
3.7.
Perspectives d’une coopération efficace
Innovations technologiques et industrie de défense
4.1.
Transfert technologique
4.2.
Nécessité d’une autonomisation technologique
4.3.
Opportunité d’une industrie de défense
Merci pour votre participation
e
Table des matières
AVERTISSEMENT _____________________________________________________ i
DEDICACE ________________________________________________________ ii
REMERCIEMENTS _________________________________________________ iii
DEFINITION DES SIGLES ET ABREVIATIONS ___________________________ iv
LISTE DES TABLEAUX __________________________________________ vii
LISTE DES PHOTOS _____________________________________________ viii
SOMMAIRE __________________________________________________________ ix
RESUME ____________________________________________________________ x
ABSTRACT __________________________________________________________ xi
INTRODUCTION GENERALE __________________________________________ 1
PARTIE I:
ETAT DES LIEUX _______________________________________ 15
CHAPITRE 1:
HISTORIQUE ET ETAT DES LIEUX DE LA COOPÉRATION
ENTRE L’AAB ET LA NAF ____________________________________________ 16
Section 1: Brève historique de l’Armée de l’Air du Bénin __________________ 16
Paragraphe 1: L’organisation de l’Armée de l’Air de 1961 à 1990 __________ 16
Paragraphe 2: L’Armée de l’Air du Bénin de 1990 à 2020 _________________ 17
Section 2: Etat des lieux de la coopération militaire entre l’AAB et la NAF ____ 24
Paragraphe 1: Une coopération structurelle en déclin _____________________ 24
Paragraphe 2: Une coopération opérationnelle qui peine à s’envoler _________ 30
CHAPITRE 2:
ANALYSE DES FORCES ET FAIBLESSES, OPPORTUNITÉS
ET MENACES (SWOT) DE L’AAB ET DE LA NAF ________________________ 34
Section 1: Les atouts et faiblesses de l’AAB _____________________________ 34
Paragraphe 1: Un personnel naviguant et technique qualifié mais longtemps restés
en inactivité
___________________________________________________ 34
Paragraphe 2: Un espace aérien et des aérodromes inexploités par l’armée faute de
moyens volants ___________________________________________________ 36
f
Section 2: Les opportunités nigérianes, les contraintes et les facteurs de risque _ 41
Paragraphe 1: Les opportunités aéronautiques, technologiques et économiques 41
Paragraphe 2: Les contraintes liées aux accords militaires avec la France (AMT) et
les facteurs de risque liés aux velléités nigérianes inavouées _______________ 44
Conclusion partielle de la première partie ________________________________ 50
PARTIE II:
LA MULTIPLICITE DES ENJEUX ET LES PERSPECTIVES D’UNE
MEILLEURE COOPERATION POUR LE BENIN __________________________ 52
CHAPITRE 3:
LES ENJEUX MULTIPOLAIRES _______________________ 53
Section 1: De la nécessité d’appuyer les autres forces de défense ____________ 53
Paragraphe 1: La marine dans la lutte contre la piraterie __________________ 53
Paragraphe 2: L’armée de terre dans le combat contre le terro-banditisme et
l’extrémisme violent _______________________________________________ 56
Section 2: Les enjeux de la participation aux opérations militaires régionales ___ 59
Paragraphe 1: Les forces en attente et l’optimisation des budgets de défense de
plus en plus croissants _____________________________________________ 59
Paragraphe 2: La participation aux opérations onusiennes de maintien de paix _ 63
CHAPITRE 4:
LES PERSPECTIVES DE COOPÉRATION EFFICACE _____ 66
Section 1: Le pôle formation et les possibilités de création des centres opérationnels
de formation du personnel ____________________________________________ 66
Paragraphe 1: La formation initiale ___________________________________ 66
Paragraphe 2: Les recyclages, stages et pôles opérationnels ________________ 69
Section 2: Le pôle maintenance des appareils et transfert de technologies ______ 71
Paragraphe 1: La maintenance des appareils sur place ou à proximité ________ 72
Paragraphe 2: Effets d’entraînement de l’industrie de défense nigériane _____ 75
Conclusion partielle de la deuxième partie________________________________ 79
CONCLUSION GENERALE ___________________________________________ 81
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ___________________________________ 84
ANNEXES ____________________________________________________________ a
g
Annexe n°1 : Liste des personnes interviewées _____________________________ a
Annexe n°2 : Guide d’Entretien __________________________________________ c
h